Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/136

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grosse pluie qui les perça jusqu’aux os ; ils glissaient à chaque pas, tombaient dans la boue, d’où ils se relevaient tout crottés, ne sachant que faire de leurs mains.

Le Petit-Poucet grimpa au haut d’un arbre, pour voir s’il ne découvrirait rien ; ayant tourné la tête de tous côtés, il vit une petite lueur comme d’une chandelle, mais qui était bien loin, par delà la forêt.

Il descendit de l’arbre, et, lorsqu’il fut à terre, il ne vit plus rien : cela le désola. Cependant, ayant marché quelque temps, avec ses frères, du côté qu’il avait vu la lumière, il la revit en sortant du bois.

Ils arrivèrent enfin à la maison où était cette chandelle, non sans bien des frayeurs : car souvent ils la perdaient de vue ; ce qui leur arrivait toutes les fois qu’ils descendaient dans quelques fonds. Ils heurtèrent à la porte, et une bonne femme vint leur ouvrir. Elle leur demanda ce qu’ils voulaient. Le Petit-Poucet lui dit qu’ils étaient de pauvres enfants qui s’étaient perdus dans la forêt, et qui demandaient à coucher par charité. Cette femme, les voyant tous si jolis, se mit à pleurer et leur dit : « Hélas ! mes pauvres enfants, où êtes-vous venus ! Savez-vous bien que c’est ici la maison d’un ogre qui mange les petits enfants ? — Hélas ! Madame, lui répondit le Petit-Poucet, qui tremblait de toute sa force aussi bien que ses frères, que ferons-nous ? Il est bien sûr que les loups de la forêt ne manqueront pas de nous manger cette nuit, si vous ne voulez pas nous retirer chez vous ; et cela étant, nous aimons mieux que ce soit monsieur qui nous mange ; peut-être qu’il aura pitié de nous, si vous voulez bien l’en prier. »

La femme de l’Ogre, qui crut qu’elle pourrait les cacher à son mari jusqu’au lendemain matin, les laissa entrer,