Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/203

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enfin, elle avait un amas de richesses merveilleuses. Elle ne s’en parait jamais que la nuit, pour plaire au roi, et le jour, n’ayant point d’endroit à les mettre, elles les cachait soigneusement dans sa paillasse.

Deux années s’écoulèrent ainsi sans que Florine se plaignît une seule fois de sa captivité. Et comment s’en serait-elle plainte ? Elle avait la satisfaction de parler toute la nuit à ce qu’elle aimait ; il ne s’est jamais tant dit de jolies choses. Bien qu’elle ne vît personne et que l’oiseau passât le jour dans le creux d’un arbre, ils avaient mille nouveautés à se raconter ; la matière était inépuisable, leur cœur et leur esprit fournissaient abondamment des sujets de conversation.

Cependant la malicieuse reine qui la retenait si cruellement en prison faisait d’inutiles efforts pour marier Truitonne ; elle envoyait des ambassadeurs la proposer à tous les princes dont elle connaissait le nom ; dès qu’ils arrivaient, on les congédiait brusquement. « S’il s’agissait de la princesse Florine, vous seriez reçus avec joie, leur disait-on ; mais, pour Truitonne, elle peut rester vestale sans que personne s’y oppose. » À ces nouvelles, sa mère et elle s’emportaient de colère contre l’innocente princesse qu’elles persécutaient. « Quoi ! malgré sa captivité, cette arrogante nous traversera ! disaient-elles. Quel moyen de lui pardonner les mauvais tours qu’elle nous fait ? Il faut qu’elle ait des correspondances secrètes dans les pays étrangers ; c’est tout au moins une criminelle d’État ; traitons-la sur ce pied, et cherchons tous les moyens possibles de la convaincre. »

Elles finirent leur conseil si tard, qu’il était plus de minuit lorsqu’elles résolurent de monter dans la tour pour l’inter-