Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/433

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— Je voulais son cœur, reprit Lirette.

— Ces idées sont toujours funestes, répliqua la bonne femme.

— Mais, ma mère, interrompit Lirette, pourquoi cette fleur qui est si belle et qui me plaît tant a-t-elle des épines ?

— Pour vous montrer, poursuivit la bonne femme, qu’il faut nous défier de la plupart des choses qui plaisent à nos yeux, et que les objets les plus agréables cachent des pièges qui peuvent nous être mortels.

— Comment, reprit Lirette, il ne faut donc pas aimer tout ce qui paraît aimable ?

— Non sans doute, lui dit la bonne femme, et il s’en faut bien garder.

— Mais j’aime mon frère de tout mon cœur, reprit-elle ; il est si beau et si charmant !

— Vous pouvez aimer votre frère, reprit sa mère ; mais s’il n’était pas votre frère, vous ne le devriez pas aimer. »

Lirette branlait la tête, et trouvait cette règle bien dure. Finfin était cependant toujours occupé de son doigt. Il pressait sur la piqûre du jus de feuilles de roses et il l’en enveloppait. La bonne femme lui demandant pourquoi il faisait cela :

« Parce que je crois, lui dit-il, que le remède peut venir de la même cause dont est parti le mal. »

La bonne femme sourit de ce raisonnement.

« Mon cher enfant, lui répondit-elle, ce n’est pas en cette occasion.

— Je croyais que c’était en tout, reprit-il, car quelquefois que Lirette me regarde, elle me trouble entièrement, je me sens tout ému ; et le moment d’après, ses mêmes regards me