Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/453

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Dans ces lieux si remplis d’horreur
Notre tourment serait extrême,
Si nous n’avions pas la douceur
Que nous ressentons en nous-même.
Avec l’objet qui sait charmer
On ne ressent aucun supplice,
Et pour ceux qui savent aimer
Tout peut se tourner en délice.

Adieu, beau prince, adieu, Mirtis,
Ayez une ardeur mutuelle ;
Sous une tendresse fidèle
Soyez toujours assujettis.

Vous nous donnez une espérance,
Laquelle nous ressentirons ;
Le plus grand bien que nous aurons
Nous viendra de votre présence.

Finfin ayant attaché ce billet au cou de la perdrix, elle s’envola bien vite. Les jeunes bergers la virent avec consolation ; mais la bonne femme n’en pouvait recevoir depuis qu’elle était séparée de ces personnes si chères, et qu’elle savait en si grand péril.

« Que ma félicité est changée ! disait-elle à madame Tu-tu : je ne suis dans le monde que pour être perpétuellement agitée ; je croyais avoir pris le seul parti qui me pouvait mettre dans le repos : qu’on est borné dans les vues que l’on prend !

— Eh ! ne savez-vous pas, reprit la fée, qu’il n’est pas d’état dans la vie où l’on puisse vivre heureux ?

— Je le sais, s’écria tristement la bonne femme, et si l’on ne fait son bonheur soi-même, on le trouve rarement ailleurs. Mais, Madame, voyez un peu le sort de mes enfants, je vous prie ; je ne saurais vivre inquiète comme je le suis.

— Ils ne se sont pas souvenus de l’ordre que je leur avais prescrit, reprit madame Tu-tu ; mais songeons au remède. »