Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/494

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Les vingt-quatre dragons qui défendaient les approches de l’île, poussant des hurlements affreux, s’élancèrent l’un contre l’autre en vomissant des torrents de flammes, et formèrent un combat de feu qui finit par les consumer eux-mêmes. Le jour revint, et il ne parut, à la place du torrent et de l'île, qu’un rocher sec et aride ; de son sommet s’envola à l’instant une autruche noire ; elle portait sur son dos le prince Cadichon et la petite princesse, nièce de Gangan.

Tous ces prodiges n’avaient pas autant étonné la Fée des champs, qu’elle fut touchée de la situation de ces aimables enfants ; et, sa tendresse lui avant conseillé de les suivre, elle fit sur-le-champ reparaître sa voiture, et partit avec tant de diligence, qu’elle eut en peu de temps rejoint l’autruche noire. Son premier dessein fut de lui enlever le prince et la princesse ; mais s’étant aperçue qu’elle prenait la route de l’île Fortunée, elle se contenta de la suivre et de l’observer de près.

En effet, au bout de quelques minutes, l’autruche s’abattit dans l’île, et tourna ses pas vers la reine des fées. Cette souveraine, assise à l’entrée de son palais, sur un trône d’or enrichi de pierreries, était entourée de ses douze fées, des vingt-quatre gines noires dont on a parlé, et d’une cour nombreuse. Dans le moment que l’autruche s’approcha du trône, la Fée des champs se saisit du prince et de la princesse, les porta aux pieds de la reine, et alors l’autruche reprit sa première forme avec son caractère : la confusion, le dépit et le désespoir se peignaient tour à tour sur son visage ; et elle était dans la plus cruelle attente de ce qui allait lui arriver, lorsque la reine lui adressa la parole en ces termes :

« La malignité de votre esprit et la perversité de votre