Page:Leskov - Le Voyageur enchanté.djvu/58

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j’avais conservé une entière liberté d’esprit, mais à peine venais-je de me lancer dans l’éternité que je me vis étendu par terre, devant moi était debout un tsigane qui tenait un couteau à la main et qui riait ; dans l’obscurité ses dents extrêmement blanches mettaient une tache lumineuse sur sa face noire.

— Qu’est-ce que tu fais là, ouvrier ? me demanda-t-il.

— Que t’importe ? lui répondis-je.

— Tu as la vie dure ? continua le tsigane.

— Évidemment je ne l’ai pas douce, répliquai-je.

— Eh bien ! au lieu de te pendre de tes propres mains, viens plutôt demeurer avec nous, tu seras peut-être pendu autrement.

— Mais qui êtes-vous et de quoi vivez-vous ? M’est avis que vous êtes des voleurs ?

— En effet, nous sommes des voleurs et des filous.

— Oui, dis-je, — mais je suppose qu’à l’occasion vous assassinez aussi les gens ?

— Cela nous arrive quelquefois.