Page:Lespérance - Les Bastonnais, 1896.djvu/127

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
125
les bastonnais

Pendant toute une heure, Cary Singleton chevaucha le long de cette route solitaire, fouillant du regard la lisière de la forêt à sa droite et la rive escarpée de la rivière à sa gauche ; mais il n’entendit rien, sauf le bruit monotone de l’eau du fleuve et le bruissement des arbres sous la brise. Il ne vit rien qui put distraire son attention de l’unique objet de ses recherches. Il commença à craindre que celles-ci ne fussent vaines. Il était déjà loin de ses quartiers, et sans cause spéciale, il ne pouvait guère prolonger davantage son absence. Il résolut donc, bien à contre-cœur, de diriger son cheval vers le camp. Avançant encore de quelques pas,
lentement et évidemment attristé par tout ceci, il arriva à un endroit où la route tournait brusquement, et à quel­ques centaines de verges devant lui, il remarqua la fumée bleue d’une petite maison de cultivateur bâtie dans la clairière du bois. Devant la maison, il y avait un groupe d’hommes, de femmes et d’enfants entourant un cheval sellé. Dire que Cary fut surpris serait se servir une expression trop faible. Il fut si étonné qu’il s’arrêta court. Sa pré­sence excita un tumulte parmi ces gens. Les enfants se précipitèrent dans la maison, les femmes se retirèrent sur la porte, mais une dame en amazone les rassura d’un geste enjoué et se mit aussitôt en selle. Leur ayant adressé quelques mots d’adieu, elle reprit la route et un instant plus tard, elle était à côté du jeune officier.

— Est-il possible. Mademoiselle ?… Ce fut tout ce que put murmurer Cary dont l’agitation était si grande qu’il lui fallait