Page:Lespérance - Les Bastonnais, 1896.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
les bastonnais

Il sortit du salon, laissant Pauline et Roderick seuls pendant un gros quart d’heure. Pas n’est besoin de dire que les heureux jeunes gens rirent et pleurèrent tour à tour dans la joie que leur causait leur victoire.

Quand M. Belmont revint de la cave avec une bouteille d’un vieux bourgogne exquis, la réconciliation fut complète et ce soir-là il n’y eut pas, dans tout Québec, de cœurs plus heureux que ceux de Roderick Hardinge et de Pauline Belmont. M. Belmont était content d’avoir fait une bonne action, mais il n’était pas vraiment heureux. Pourquoi ? La suite nous le dira.


XVIII
roderick hardinge.

Il était près de neuf heures lorsque Hardinge rentra dans ses appartements, aux casernes. Il avait passé une journée semée de péripéties et il se sentait fatigué. L’entrevue qu’il venait d’avoir avec M. Belmont était, néanmoins, si exclusivement l’objet de ses préoccupations, qu’il ne parut pas disposé à chercher le repos que réclamait l’épuisement de ses forces physiques.

Machinalement, il ôta son costume civil et revêtit la petite tenue de son grade. Puis il se mit à marcher dans sa petite chambre, absorbé dans ses pensées. De temps en temps il parlait à intelligible voix, sans en avoir conscience, ou il fredonnait des morceaux de chansons ou même il se mettait à rire tout doucement.

Arnold et sa troupe de rebelles étaient complètement oubliés pour le moment. Les événements militaires qui l’avaient tant occupé dans le cours des derniers jours étaient comme effacés de sa mémoire et les mouvements des troupes dans les cours des casernes échappaient complètement à son attention.

On a dit, et non sans raisons plausibles, que le soldat, à la veille