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à force d’aimer

encore secrètement, vers ces lèvres qui sans doute seraient trop heureuses de le consoler, vers ces yeux qui lui verseraient la douceur d’autrefois. Les reproches qu’elle essaierait de lui adresser ne se prolongeraient guère lorsqu’elle le verrait souffrir. Il conviendrait de ses torts. Que lui en coûtait-il ? Et quand il aurait dit : « Ah ! Hélène, vous êtes la seule femme que j’aie vraiment aimée. L’ambition m’a détourné de vous. J’en suis cruellement puni… » n’était-il pas sûr de voir ruisseler les larmes de pitié crédule, seul baume souhaitable, au moins à la première heure, pour ses irritantes blessures ?

D’ailleurs il n’apportait l’offre d’aucune réparation sérieuse. La joie de l’étreindre et de le consoler ne suffirait-elle pas à celle qui l’avait trop aimé jadis pour ne pas l’aimer encore, et dont il avait trop bien dévasté la vie pour que rien y pût fleurir qui étouffât les ardentes racines du passé ?

Le mariage — qu’il lui avait rendu à peu près impossible — ne s’était pas présenté pour elle, il le savait. Et, quoiqu’il l’eût séduite, il l’estimait trop honnête pour prendre un second amant. La solitude où elle devait vivre, plus navrante qu’un veuvage, avait, sans nul doute, entretenu dans une ardeur latente sa passion pour l’infidèle. Il n’aurait qu’à se montrer…

Toutefois la rencontre, dans le jardin, d’un