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à force d’aimer

– Si c’est sur René, » reprit-il sans obéir à son injonction, « vous avez tort. Ce petit bonhomme ne m’a pas l’air malheureux du tout. Avec une charmante et tendre mère comme la sienne… »

Hélène le considéra, l’air ironique, puis d’une voix mordante :

— « Et avec un charmant et tendre père comme le sien… »

Édouard Vallery dit sèchement :

— « Il n’a tenu qu’à vous que cet enfant trouvât en moi des sentiments vraiment paternels. C’est vous qui m’avez éloigné, qui m’avez fermé votre porte. Je n’étais pas sûr aujourd’hui même que vous consentiriez à me recevoir. »

Elle répliqua :

— « Je n’ai cessé de vous voir que lorsque vous vous êtes marié. Vous avez épousé une grosse dot, et vous m’avez proposé d’en manger ma part avec vous. Oui, je sais… vous n’auriez pas rompu. Vous m’auriez gardée comme maîtresse, et vous seriez venu jouer de temps à autre avec votre enfant. C’est à ce prix, n’est-ce pas ? que je lui aurais conservé son père. J’ai préféré ne pas entrer avec mon René dans cette existence d’abominations et de mensonges. »

Le visiteur haussa les épaules.

— « Grands mots !… » dit-il. « Je vous aimais, j’aimais notre fils… Mon cœur s’est brisé quand vous vous êtes retirée de moi en me l’enlevant