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Page:Lettre d'Abgar, 1868.djvu/14

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tous les désirs du monarque. À l’arrivée de l’apôtre, le roi, qui était entouré de ses satrapes, de ses ministres et des grands seigneurs, demeura stupéfait, car il voyait le visage d’Addé tout enflammé d’une lumière éclatante ; et, se jetant en même temps par terre, Abgar se prosterna devant l’apôtre. À cet acte du roi, tous les assistants furent étonnés, car ils ne voyaient pas le prodige qui apparut au roi. Alors le roi dit à Addé : « Dites-moi en vérité, êtes-vous bien le disciple de ce puissant Jésus, fils de Dieu, qui me promit de m’envoyer un de ses disciples pour me rendre la guérison et la vie ? » Addé lui répondit : « C’est parce que vous avez cru en lui, qu’il m’a envoyé à vous ; maintenant si vous croyez en lui de tout votre cœur, tous vos désirs seront accomplis ». Abgar lui répondit : « J’ai cru tellement en lui, que lorsque je fus informé que les Juifs l’avaient crucifié, je voulus marcher contre eux avec mes troupes pour les exterminer ; mais je fus arrêté à cause des Romains, car nous avions conclu un traité de paix avec l’empereur Tibère, comme c’était l’usage de nos prédécesseurs[1] ». L’apôtre Addé lui dit : « Notre Seigneur Jésus-Christ ayant exécuté la volonté de son père, monta vers lui et s’assit avec lui dans la gloire éternelle où il était déjà avant les siècles ». Le roi lui répondit : « Et moi, je crois en lui et en son Père ». L’apôtre dit[2] : « Puisque vous croyez de

  1. Ces paroles conviennent mieux dans la bouche d’un roi d’Édesse, que du roi de l’Arménie nouvellement subjuguée par les Romains. — Dans le livre apocryphe de l’Évangile de l’Enfance, manuscrit syrien du VIe siècle conservé au British-Museum, il est dit qu’Abgar en apprenant le crucifiement de J.-C., par les Juifs, fut bien chagrin ; il se porta tout de suite jusqu’à l’Euphrate, voulant aller renverser Jérusalem : mais arrivé aux bords du fleuve il réfléchit que son expédition pourrait attirer sur lui la colère de l’empereur Tibère. Il se contenta donc d’écrire au préfet Sabina (Sabinius) qui communiqua à Tibère la lettre d’Abgar. Cette lettre citée par le livre apocryphe a beaucoup de ressemblance avec la première lettre d’Abgar conservée chez Moïse de Khorène (II, 33), qui vient ainsi recevoir une nouvelle approbation bien que d’une source gâtée.
  2. C’est ici que commence l’original syrien de cet ouvrage, publié par Cureton, sous le titre Doctrine de l’Apôtre Addée, pag. 6.