Page:Lettre d'Abgar, 1868.djvu/30

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qui adorent Bathnicale[1] à l’instar de vos voisins les habitants de Haran, d’autres qui adorent Thartha[2] à l’instar des Abudiens[3], et le soleil et la lune et l’aigle, comme les Arabes. Ne vous laissez point séduire par les rayons de l’étoile du matin lorsqu’elle se lève[4], car tous ceux qui adorent les créatures sont maudits par Dieu. Quoique certaines créatures vous semblent l’emporter sur d’autres, elles sont toutes égales, comme je vous l’ai dit. C’est une maladie affreuse et incurable dont sont affectés les hommes qui se prosternent devant les créatures et les glorifient ; car comme celles qui reçoivent des hommages ne peuvent aider à elles-mêmes, mais dépendent du pouvoir et des soins de celui qui les créa, de même elles ne peuvent pas être adorées et honorées en même temps que celui qui les tira du néant ; et c’est blasphémer Dieu que de faire partager à des créatures, qui ne ressemblent nullement à la nature de son existence, sa gloire et ses honneurs. Toutes les révélations des prophètes et les prédications qui furent annoncées après eux sont renfermées dans cette seule doctrine : que les créatures doivent renoncer à adorer leurs semblables au lieu du Créateur, et que les enfants des hom-

  1. J. de Seroug, au lieu de celui-ci cite d’autres noms, et parmi lesquels comme principal Bel-Shemin, nommé Bar-Shamin par notre M. de Khorène (II, 14) qu’on adorait comme le maître des cieux. On connait à Haran ou Charrée le temple de Bessine, la déesse Lune, qui restait debout même au IVe siècle, et qui fut honorée par Julien l’Apostat.
  2. On ne connait pas précisément l’équivalent de Tharatha ou Thartha dans le panthéon grec ou romain : on la croit une divinité féminine de Janus, et comme le symbole de la Lune, ou de Diane même ; selon d’autres elle serait Rhéa ou Cybèle.
  3. Il faudrait corriger ce nom en Abougiens, ou plutôt Mabougiens, qui seraient les habitants de Membèje ou Hiérapolis des Grecs, comme le fait supposer J. de Seroug, en le dérivant du nom de Maboug, d’où la ville même serait appelée ville des dieux, ou Diospolis ; c’est le même sens que donne aussi le nom grec de Hiérapolis ; — Chez les anciens Assyriens, on voit souvent une divinité en forme d’Aigle, on la croit la même que Nesrac ou Nisroch (II Rois, XIX, 37 ; Isaïe XXXVII, 38).
  4. Sans doute il parle contre les Sabéens, et les adorateurs des corps célestes.