mariées, qui ont le décorum à garder, vont se
prostituer ; soit parce qu’elles n’aiment pas leurs
époux, soit qu’ils ne leur donnent pas pour leurs
toilettes tout l’argent dont elles ont besoin, soit
enfin par la force du tempérament ou autrement.
Les teneuses de ces maisons s’engagent pour une
certaine somme de vous faire jouir de telle ou
telle femme que vous aurez vue à la promenade
ou au spectacle. Voici comme elles s’y prennent :
Il est essentiel que tu saches que les femmes ici
sont coquettes à l’excès ; souvent un mari qui
aime sa moitié et qui en est aimé, ne peut pas
faire face au dépenses qu’elle lui occasionne ;
l’épouse qui est attachée à son homme réfléchit
qu’elle peut causer sa ruine, et en épouse censée,
elle va droit à la cour des aides. Mais celles qui
ne connaissent pas ces bienfaisants établissements,
sont bientôt, lorsqu’elles sont jolies,
raccrochées par de vieilles duègnes aux promenades
ou aux portes des spectacles. Ces vieilles
d’abord inspirent la pitié par de soi-disants
malheurs : elles lient petit à petit la conversation
et finissent par persuader à la femme, en la flattant
beaucoup, qu’elle est aimée, adorée par un
superbe homme, d’une fortune considérable. Je
ne sais trop ce qu’elles peuvent dire de plus,
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LETTRE TREIZIÈME