Page:Lettres d’un habitant des Landes, Frédéric Bastiat.djvu/21

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heures, je respirais un air infecté de républicanisme ; et, me voici plongé dans une atmosphère monarchique ; et bien ! le croiriez-vous, je ne me suis pas même aperçu de la transition ; le dernier mot que j’ai entendu de l’autre côté de la frontière est justement le même qu’on m’a adressé de celui-ci : « Votre passe-port. » Hélas ! je n’en avais pas. Un moment, j’ai espéré qu’on allait me renvoyer à Paris et le cœur m’a battu ; mais tout se civilise, même le gendarme, même le douanier ; bref, on m’a laissé passer, en me recommandant de venir faire une déclaration au ministère de la justice, car, ajoutait le gendarme, « nous y avons été pris plusieurs fois et récemment encore nous avons failli laisser échapper M. Proudhon. » — « Je ne suis pas surpris, ai-je répondu, que vous soyez devenu si avisé, et certes j’irai faire ma déclaration pour encourager la gendarmerie dans cette voie. »

Mais reprenons les choses de plus haut ; samedi, en sortant de la séance (vous voyez que j’écris un journal consciencieux) j’articule le mot Bruxelles : « J’y vais demain, à huit heures et demie, dit Barthélemy Saint-Hilaire, partons ensemble. » Là-dessus je me