encore plus bête que de coutume ; mais qu’importe ? ce n’est pas mon esprit, ce sont mes maux qui vous ont intéressé.
LETTRE VII
Je vous ai écrit hier, et je vous écris ce soir. Si j’attendais trois jours, c’est-à-dire jusqu’à mercredi, peut-être ne répondrais-je jamais à votre lettre du 10, que M. le chevalier d’Aguesseau m’a apportée aujourd’hui. D’abord (car il y a encore peut-être un avenir pour moi), il faut que je vous dise de m’adresser directement vos lettres ; me les faire passer par l’entremise de M. d’Aguesseau, c’est mettre un hasard de plus contre moi : le chevalier d’Aguesseau peut aller à la campagne, voyager, etc. ; enfin c’est bien assez d’être à mille lieues, n’y ajoutez rien. Oh ! je m’en vais vous paraître folle : je vais vous parler avec la franchise et l’abandon qu’on aurait, si l’on croyait mourir le lendemain ; écoutez-moi donc avec cette indulgence et cet intérêt qu’on a pour les mourants. Votre lettre m’a fait du bien : je l’attendais toujours ; mais j’avais cessé de la désirer, parce que mon âme ne pouvait plus avoir un mouvement qui ressemble au plaisir. Eh bien ! vous le dirai-je ? vous avez fait diversion pendant quelques moments à l’effroi qui absorbe toute mon existence. Ah ! mon Dieu, je crains pour ma vie, la mienne y est attachée, et j’ai besoin de vous parler. Concevez-vous ce qui peut m’animer et ce qui m’entraîne vers vous ? cependant je ne suis pas contente de votre amitié ; je