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L’ÉPOUVANTE

Par un phénomène d’auto-suggestion, il se persuadait qu’il était la victime, l’instrument d’un autre, lequel, en vérité, n’était que lui-même. Depuis le début, il n’avait eu qu’un ennemi : sa propre imagination. Il n’était captif que de sa faiblesse maladive, et ce dernier effort, cette tentative suprême pour s’arracher à ce qu’il croyait être une possession diabolique, n’avait abouti qu’à lui prouver, d’une façon indiscutable cette fois, que seule la puissance occulte, la volonté mystérieuse qui agissaient sur lui, étaient capables de lui faire prendre une décision !

Les fous qui retrouvent après une crise, assez de lucidité d’esprit pour se rendre compte de leur démence et redouter l’accès qui peut les reprendre d’un instant à l’autre, sont les plus malheureux des êtres. Est-il une torture plus effroyable que de se dire :

— Tout à l’heure, ma raison va sombrer ; peut-être, alors, d’effrayants instincts feront-ils de moi un monstre… et, sauf à la seconde précise où mon poing frappera, je ne cesserai de savoir vers quel horrible but me pousse la fatalité !