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XX

mes, de quelque religion, secte et nation qu’ils soient, jusques aux Castillans. » L’esprit élevé de Cervantes était au-dessus de ces petites jalousies si sottes, qui font que les hommes se détestent sans se connaître. Dans la plupart de ses écrits il loue « la courtoisie, la libéralité, l’esprit et la douceur des Portugais, » et il appelle Lisbonne « une ville grande et renommée. »

La campagne terminée, Cervantes renonça au service militaire, dont il avait tiré plus de gloire que de profit, mais où il avait beaucoup vu, beaucoup observé. Pour son génie pénétrant et pratique, la vie de soldat fut une école où il apprit à connaître les hommes et les choses : il avait en effet une grande expérience des uns et des autres, et ses voyages contribuèrent encore à l’augmenter. De là cette variété de connaissances, cette justesse d’aperçus, cette vérité des descriptions et la vivacité de ses tableaux, qu’il peignait d’après nature. On a même remarqué qu’il profita de l’occasion que lui offraient ses campagnes sur mer pour s’instruire dans l’art de la navigation, qu’il savait à fond, ainsi qu’on le voit par ses écrits. Cependant, depuis qu’il était sorti d’Espagne, à la suite du légat Acquaviva, jusqu’à son retour, son temps n’avait pas été uniquement employé à s’instruire et à observer. Il avait repris ses premiers essais poétiques, et il est certain qu’il avait fait des vers durant son séjour à Alger. On croit même qu’il avait ébauché quelques comédies ; car les prisonniers