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Page:Levoyageauparnas00cerv.djvu/33

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XXIII

C’est le défaut de la poésie pastorale où les anciens ont seuls excellé, pour s’être tenus dans les limites de la nature ; car leurs bucoliques sont des scènes dialoguées et des tableaux des mœurs et de la vie des champs. Les idylles des modernes sont presque toutes ennuyeuses, malgré le charme de la poésie et le talent descriptif.

Qu’on se figure par là quel intérêt peuvent offrir six livres fort longs, mêlés de prose et de vers, où l’on ne voit partout que bergers et bergères, qui chantent sans cesse, se lamentent toujours, et ne songent qu’à mourir de plaisir ou de désespoir. Tous ces personnages se ressemblent, et l’ennui naît de cette uniformité. Ni l’harmonie du langage, ni la beauté du style, ni la richesse des descriptions, ni la vivacité des couleurs, ni les prestiges de l’art n’ont pu sauver la monotonie du fond. Je ne crains pas d’affirmer que ce premier ouvrage de Cervantes, où se révèlent déjà plusieurs de ses qualités d’écrivain, est plus digne de son siècle que de lui. Voici, du reste, le jugement qu’il en a porté lui-même dans la revue si comique de la bibliothèque de don Quichotte, modèle de bon goût et de fine critique.

C’est le curé qui parle à son compère le barbier :

« Et celui qui est là tout auprès, comment s’appelle-t-il ? — C’est la Galatée de Michel de Cervantes, répondit maître Nicolas. — Il y a longtemps que ce Cervantes est de mes amis, reprit le curé, et l’on sait qu’il est encore plus célèbre par ses malheurs que