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XLVI

autant d’intermèdes. L’auteur savait au juste ce qu’elles pouvaient valoir. Il ne se faisait point illusion sur leur mérite ; mais il lui semblait en somme qu’elles pouvaient soutenir la comparaison avec celles qui avaient la vogue. Le plus difficile était de trouver un éditeur. Cervantes s’adressa au libraire Juan de Villaroël, qui répondit à ses propositions qu’il lui achèterait volontiers ses comédies, s’il n’avait ouï dire à un auteur en crédit que de sa prose on pouvait attendre beaucoup, mais qu’il ne fallait rien attendre de ses vers. Cette réponse ingénue surprit Cervantes, et il avoue qu’il en fut quelque peu mortifié. Au fond, ce jugement est juste, quoique trop sévère.

Cervantes en jugea autrement et persista dans son dessein. Après des démarches inutiles, il revint au même libraire, et lui vendit son privilége moyennant une somme raisonnable. Les comédies, accompagnées de leurs intermèdes respectifs, parurent au mois de septembre 1615, avec une belle dédicace au comte de Lémos, et un prologue fort savant et merveilleusement écrit, où l’on trouve des choses précieuses pour l’histoire du théâtre espagnol. Les pièces furent froidement accueillies du public et n’entrèrent pas dans le répertoire des comédiens.

Cette fois le public jugea bien. Ces comédies sont médiocres, et l’on ne peut les défendre, soit qu’on soutienne avec don Blas Nasarre, dont il est permis de suspecter la sincérité sur ce point, que Cervantes mit tout