Page:Lewis - Le Moine, Tome 1, trad Wailly, 1840.djvu/164

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

noncer, don Alphonso, que votre présence ici ne peut plus être agréable ni au baron ni à moi. Ce n’est pas pour dire des extravagances à ma nièce que vos parents vous ont envoyé en Allemagne : vous avez à voyager, et je serais au regret d’entraver plus longtemps un si parfait dessein. Adieu, seigneur ; souvenez-vous que demain matin nous nous voyons pour la dernière fois. »

« Ayant dit, elle lança sur moi un regard d’orgueil, de mépris, de méchanceté, et quitta l’appartement. Je me retirai aussi dans le mien, et passai la nuit à chercher les moyens d’arracher Agnès au pouvoir tyrannique de sa tante.

« Après la déclaration formelle de la maîtresse du château, il m’était impossible de faire un plus long séjour à Lindenberg. Le lendemain donc j’annonçai mon départ immédiat. Le baron assura qu’il en avait une peine sincère, et me fit de si chaudes protestations que j’entrepris de le mettre dans nos intérêts. Mais à peine eus-je nommé Agnès qu’il m’arrêta court, et me dit qu’il ne lui était pas possible d’intervenir dans cette affaire. Je compris qu’il était inutile de discuter. La baronne exerçait sur son mari une autorité despotique, et je vis facilement qu’elle l’avait prévenu contre ce mariage. Agnès ne parut pas. Je demandai la permission de prendre congé d’elle, mais ma prière fut rejetée. Je fus obligé de partir sans la voir.

« Au moment où je le quittais, le baron me prit affectueusement la main, et m’assura que, dès que sa nièce serait partie, je pourrais considérer sa maison comme la mienne.

« Adieu, don Alphonso ! » dit la baronne, et elle me tendit la main.

« Je la pris, et voulus la porter à mes lèvres ; elle m’en