Page:Lewis - Le Moine, Tome 1, trad Wailly, 1840.djvu/46

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En ce moment le portier des capucins entra dans la cathédrale afin d’en fermer les portes pour la nuit. Les deux gentilshommes se retirèrent immédiatement, et se rendirent en toute hâte au palais de Las Cisternas.


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« Eh bien, Antonia, » dit la tante aussitôt qu’elle eut quitté l’église, « que pensez-vous de nos galants ? Réellement don Lorenzo paraît être un bon et obligeant jeune homme : il a fait quelque attention à vous, et personne ne sait ce qui peut en advenir. Mais quant à don Christoval, je vous proteste que c’est un phénix de politesse. Si galant ! si bien élevé ! si spirituel et si tendre ! Ah ! si jamais homme peut me décider à rompre le vœu que j’ai fait de ne point me marier, ce sera ce don Christoval. Vous voyez, nièce, que chaque chose tourne exactement comme je vous l’ai prédit ; je savais bien que dès l’instant où je me montrerais à Madrid, je serais entourée d’adorateurs. Quand j’ai ôté mon voile, avez-vous vu, Antonia, l’effet que j’ai produit sur le comte ? Et quand je lui ai présenté ma main, avez-vous observé l’air passionné avec lequel il l’a baisée ? Si jamais j’ai vu symptômes d’amour réel, c’est bien sur la physionomie de don Christoval ! »

Antonia avait observé de quel air don Christoval avait baisé cette main ; mais comme elle en avait tiré des conclusions quelque peu différentes de celles de sa tante, elle eut la prudence de se taire. Comme c’est le seul exemple connu qu’une femme ait jamais tenu sa langue, on l’a jugé digne d’être cité ici.

La vieille dame continua de parler à Antonia sur le même ton, jusqu’à ce qu’elles eussent gagné la rue où