Page:Lewis - Le Moine, Tome 1, trad Wailly, 1840.djvu/52

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CHAPITRE II.


Forse se tu gustassi una sol volta
La millesima parte delle gioje,
Che gusta un cor amato riamando,
Diresti ripentita sospirando,
Perduto è tutto il tempo
Che in amar non si sponde.

Tasso.
Peut-être si tu goûtais une seule fois la millième partie des joies que goûte un cœur aimé qui aime, repentante, tu dirais en soupirant : Il est perdu tout le temps qu’on ne passe pas à aimer.
Séparateur


Reconduit par les moines jusqu’à la porte de sa cellule, le prieur les congédia en homme convaincu de sa supériorité, d’un air où l’apparence de l’humilité luttait contre la réalité de l’orgueil.

Il ne fut pas plus tôt seul, qu’il se livra sans contrainte aux enivrements de sa vanité ; en se rappelant l’enthousiasme que son sermon avait excité, son cœur s’enfla de joie, et son imagination lui présenta de splendides visions d’agrandissement. Il promena autour de lui des regards triomphants, et l’orgueil lui dit hautement qu’il était supérieur à tout le reste de ses semblables.

« Quel autre que moi, » pensait-il, « a subi l’épreuve de la jeunesse, et n’a pas une seule tache sur la conscience ? Quel autre a dompté de violentes passions, un tempérament impétueux, et s’est soumis, dès l’aube de