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Page:Lewis - Le Moine, Tome 2, trad Wailly, 1840.djvu/121

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faite de passer la nuit dans lu chambre du revenant. Il réitéra sa promesse ; il trouva Antonia assez bien, mais toujours préoccupée de la prédiction de l’ombre. Flora ne bougea pas du lit de sa maîtresse, et par des symptômes plus marqués encore que la nuit précédente, témoigna son mécontentement de la présence du prieur. Cependant Ambrosio feignit de ne point les remarquer. Pendant qu’il causait avec Antonia, le médecin arriva. Il faisait presque sombre ; on demanda des lumières, et Flora fut forcée de descendre en chercher. Comme elle laissait un tiers dans la chambre, et qu’elle ne comptait s’absenter que peu de minutes, elle crut pouvoir sans risque quitter son poste. Elle ne fut pas plus tôt dehors, qu’Ambrosio se dirigea vers la table où était la médecine d’Antonia, et qui était située dans l’embrasure de la croisée. Le médecin, assis dans un fauteuil, et occupé à questionner sa malade, ne faisait aucune attention aux mouvements du moine. Ambrosio saisit l’occasion ; il tira la fiole, et en versa quelques gouttes dans la médecine ; puis il se hâta de s’éloigner de la table, et de revenir à sa place. Quand Flora reparut avec des lumières, tout semblait être exactement comme elle l’avait laissé.

Le médecin annonça qu’Antonia pourrait quitter la chambre le lendemain en toute sûreté ; il lui recommanda de suivre l’ordonnance qui, la nuit d’avant, lui avait procuré un sommeil rafraîchissant. Flora répondit que la potion était toute prête sur la table : il engagea la malade à la boire sans délai, et il se retira. Flora versa la médecine dans une tasse, et la présenta à sa maîtresse. En ce moment le courage manqua à Ambrosio. Mathilde ne pouvait-elle pas l’avoir trompé ? Si la jalousie l’avait poussée à faire périr sa rivale, et à substituer un poison à un narcotique ! Ce soupçon lui parut si fondé, qu’il