Page:Lewis - Le Moine, Tome 2, trad Wailly, 1840.djvu/178

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bien était bas et inhumain le crime qu’il venait de commettre. Il se releva brusquement. Celle qui naguère était l’objet de son adoration n’excitait plus dans son cœur d’autre sentiment que l’aversion et la rage. Il s’était détourné, et si ses yeux se reportaient sur elle involontairement, ce n’était que pour rencontrer des regards de haine. L’infortunée s’était évanouie avant que son déshonneur fût consommé : elle ne revint à la vie que pour sentir son malheur. Elle resta étendue sur la terre dans un muet désespoir ; les larmes se succédaient lentement sur ses joues, et de fréquents sanglots gonflaient sa poitrine. Accablée de chagrin, elle demeura quelque temps dans cet état de torpeur ; enfin elle se leva avec difficulté, et traînant vers la porte ses pas affaiblis, elle se disposa à quitter le caveau.

Le son des pas tira le moine de sa sombre apathie. Se relevant de la tombe où il était appuyé, ses yeux errant sur les débris corrompus qu’elle contenait, il poursuivit la victime de sa brutalité, et l’eut bientôt rejointe. Il la saisit par le bras, et la repoussa violemment dans le caveau.

« Où allez-vous ? » cria-t-il d’une voix sévère ; « revenez à l’instant. »

Antonia tremblait : il avait l’air furieux.

« Que voulez-vous de plus ? » dit-elle timidement ; « ma ruine n’est-elle pas complète ? ne suis-je pas perdue, perdue à jamais ! votre cruauté n’est-elle pas satisfaite, ou ai-je encore plus à souffrir ? Laissez-moi partir ; laissez-moi retourner chez moi, et pleurer en liberté ma honte et ma misère. »

« Retourner chez vous ! » répéta le moine, avec une ironie amère et dédaigneuse ; puis tout à coup, les yeux flamboyant de colère : « Quoi ! afin que vous me dénonciez