Page:Lewis - Le Moine, Tome 2, trad Wailly, 1840.djvu/221

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crimes qu’il avait commis, mais ceux aussi dont il était innocent, les inquisiteurs commencèrent leur interrogatoire. Quoiqu’il redoutât la torture comme il redoutait la mort qui devait le livrer aux tourments éternels, le prieur protesta de son innocence d’une voix hardie et résolue. Mathilde suivit son exemple, mais trembla de peur en parlant. Après l’avoir vainement exhorté à avouer, les inquisiteurs commandèrent que le moine fût mis à la question. L’ordre fut immédiatement exécuté. Ambrosio souffrit les plus atroces supplices que la cruauté humaine ait jamais inventés. Cependant la mort est si effrayante quand le crime l’accompagne, qu’il eut assez d’énergie pour persister dans son désaveu : en conséquence, on redoubla ses angoisses ; et on ne le laissa que lorsque, s’étant trouvé mal de douleur, l’insensibilité l’eut soustrait aux mains de ses bourreaux.

Mathilde, ensuite, fut appliquée à la torture ; mais épouvantée à la vue des souffrances du prieur, son courage l’abandonna entièrement : elle tomba à genoux et convint de son commerce avec les esprits infernaux, et d’avoir vu le moine assassiner Antonia ; mais quant au crime de sorcellerie, elle se déclara seule criminelle : Ambrosio en était parfaitement innocent. Cette dernière assertion n’obtint aucun crédit. Le prieur reprit connaissance à temps pour entendre l’aveu de sa complice ; mais il était trop affaibli par ce qu’il avait déjà souffert pour être capable en ce moment de subir de nouveaux traitements. On le renvoya à son cachot, non sans l’avoir prévenu que dès qu’il serait suffisamment rétabli, il devait se préparer à un second interrogatoire. Les inquisiteurs espéraient qu’il serait alors moins endurci et moins obstiné. On annonça à Mathilde qu’elle expierait son crime dans le feu au prochain auto-da-fé. Ses pleurs et ses sup-