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III

Tannhäuser


Le Vaisseau-fantôme fut, sinon un échec, du moins, un demi succès. Accueilli avec faveur le soir de la première, malgré une interprétation défectueuse, il fut malmené par la critique locale, qui trouva l’instrumentation trop chargée, la musique trop uniformément sombre, trop pauvre en mélodies faciles à retenir, plutôt savante qu’émouvante. Quant au public, qui espérait que Wagner allait lui offrir quelque chose d’analogue à Rienzi, il se sentit désorienté en présence d’une œuvre si complètement originale, si diamétralement opposée à ce qu’on attendait de l’auteur. Aussi se laissa-t-il persuader par les critiques que l’œuvre était manquée, et, après la quatrième représentation, le Vaisseau-fantôme fut mis de côté. En même temps Rienzi était repris avec un succès constant. La leçon était claire. Si Wagner voulait retrouver un triomphe comme celui de Rienzi, il lui fallait à tout prix faire le sacrifice de ses idées nouvelles sur le drame musical et revenir au genre historique, à la pièce à grand spectacle. À quel parti allait-il s’arrêter ?

Il rapportait de Paris deux idées dramatiques de valeur très inégale, conçues l’une et l’autre après l’achèvement du Vaisseau-fantôme pendant les quelques mois qui s’écoulèrent encore avant son départ pour l’Allemagne : un projet de drame historique sur Manfred, un projet de drame « romantique » sur la légende de Tannhäuser.

C’est le projet de drame historique qui avait sollicité le