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Page:Liebrecht - Histoire de la littérature belge d’expression française, 1909.djvu/356

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La toute puissante influence de Mallarmé, qui enveloppe de sa caresse cette partie de notre poésie, se décèle encore chez André Fontainas.[1] Poète inégal, que le souci de s’exprimer complètement égara parfois dans le dédale des techniques et dans la forêt des symboles, il a pourtant exprimé dans Les Crépuscules la trouble recherche d’une âme partie à la conquête du rêve. La Nef désemparée raconte le retour nostalgique du poète qui a entrevu cette impossible Toison d’Or, dans un pays fabuleux, peuplé de figures merveilleuses. « Tous les décors, proclame Georges Marlow, tous les héros de la Légende ressuscitent dans ses poèmes, harmonieux et éclatants comme une fanfare de sacre, étincelants comme de purs joyaux, troublants comme un parfum de fleurs rares. »[2]

Le mystère de l’ombre et du silence que Fontainas évoqua dans plusieurs poèmes fut par dessus tout autre le thème favori de Georges Rodenbach. Le poète qui chanta sur tous les modes le charme ensorceleur de Bruges occupe dans la poésie belge une place à part, où son œuvre s’enveloppe d’un caractère mystérieux. Il sut percevoir et rendre un petit nombre de sensations et ce lot restreint lui appartient en propre. Il est le poète du Silence et des cités flamandes, si mélancoliques, « dont il semble avoir pénétré l’âme, tant il en a merveilleusement noté la paix et la tristesse d’agonie. » Dans Le Règne du Silence et dans Le

  1. Cft Maurice Gauchez : André Fontainas, (Vers et Prose t. XIII).
  2. Voir Belgique Artistique et Littéraire, septembre 1908.