Page:Lintier - Ma pièce, 1917.djvu/91

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celle du bienfaiteur pour son obligé, n’est-ce pas, monsieur Perrichon ? Sentiment de supériorité et d’orgueil, nul n’a plus de charme.

Certes, le sang, si vaillamment répandu pour nous en Belgique, nous y vaudra plus d’amitié que vingt années d’efforts pour le maintien de la langue et de la culture françaises contre la germanisation. Et, dans quelque quarante ans encore, lorsque nous rencontrerons chez nous un brave Belge, il nous dira avec son aimable accent :

— Eh bien, monsieur, sais-tu, tout de même, sans nous, en 1914…

Il sera heureux de nous rappeler tout ce que la France doit à son glorieux petit pays ; mieux, il nous en sera reconnaissant.

— Oh ! allez, nous dit la mère, ça nous coûte cher d’avoir défendu notre neutralité. C’est effrayant ce qu’ont fait les Allemands dans le pays !… C’est surtout sur les femmes qu’ils s’acharnent. Il y en a une de par là, que nous connaissons bien… ils lui ont coupé les seins… et puis ils l’ont éventrée. Et ce qu’ils ont fait à tant d’autres ! Si c’est pas malheureux, monsieur ! Il faut tout de même être pires que des bêtes ! C’est des choses qu’il faudra dire chez vous quand vous retournerez, ce qu’on a souffert par ici. Dites : vous ne serez tout de même pas comme ça quand vous irez chez eux ?