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AUTOUR D’UNE AUBERGE

prenez les dangers que court notre jeunesse ; et non parce que vous ne pouvez, vous n’avez pas le courage de porter votre croix.

— Mon ami, dit le Curé d’une voix émue, quand on est jeune, on espère en l’avenir. L’espérance retrempe le caractère et redonne de la vigueur pour supporter les épreuves. Quand on est jeune, tout nous sourit. Que de projets ne fait-on pas ? On compte sur la bonté de ses paroissiens qui semblent nous aimer. On leur fait tout le bien possible, on croit que ces fruits seront durables. Mais, comme les bienfaits s’oublient vite ! Comme on se rappelle plus aisément les réprimandes qu’il a fallu donner ! Comme nos gens sont portés à tout critiquer… Vous ne voyez pas ces choses comme je les vois moi-même. J’en suis venu à douter de la reconnaissance, c’est un vain mot !

— Pourtant, M. le Curé, il y a encore beaucoup de vos paroissiens qui vous aiment. Soyez sûr, que si l’occasion s’en présentait la grande majorité serait pour vous. Remarquez, M. le Curé, que ceux qui vous résistent ne forment qu’un petit groupe, que nous pourrions combattre si nous en prenions les moyens.

— Croyez-vous, dit M. Héroux, que Sellier n’a pas plus d’influence sur nos gens que moi ?

— À cela, dit à son tour M. Bonneterre, laissez-moi vous dire que si vous le vouliez, vous pourriez faire une sérieuse brèche à la puissance de Sellier.