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Page:Lisbois - Autour d'une auberge, 1909.djvu/8

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AUTOUR D’UNE AUBERGE

ragaillardit ; c’est de la bêtise ! Il faut être un peuple de sots pour subir pareil esclavage ! Vive la France ! pays de toutes les libertés !

Dans tous les cas, mon cher Rougeaud, je suis venu te dire que le sermon d’hier commence à remuer l’opinion. Quelques hommes sont venus au moulin, ce matin, et des gens qui savent avaler ça, pourtant, sont d’avis que le Curé a raison, et que, pour un an, on devrait retrancher l’auberge. Je compte sur toi, entends-tu, comme par le passé, pour travailler dans le sens contraire. Le moulin a besoin de l’auberge, et l’auberge a besoin du moulin. L’un ne marchera pas sans l’autre. Tu sais où vont les recettes, hein ! Si l’auberge disparaît, je ferme le moulin… Le moulin fermé, tes revenus seront minces. D’un autre côté, il m’est tout à fait impossible de paraître au grand jour ; toi, tu es le maire, l’homme de confiance de tout le monde, il te faut marcher. Je te fournirai la munition, et les pièces sonnantes qui auront raison des scrupules de bien des dévots : tu te rappelles le succès des années passées et des dernières élections ? Une poignée de billets verts ramène vite à la raison. Quant aux arguments de ceux qui ne voudront pas se vendre, il y en a, tu sais, démontre-leur que retrancher l’auberge, c’est faire reculer la paroisse de vingt ans en arrière. C’est la ruine du commerce… où logeront les voyageurs ? Il est impossible d’empêcher la