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THUCYDIDE, LIV. I.

trouveraient les ennemis dans l’embarras de chercher un passage. Le soupçon de manœuvres pratiquées contre la démocratie entrait pour quelque chose dans cet armement. Des cavaliers thessaliens vinrent les joindre en qualité d’alliés ; mais, dans l’action, ils passèrent du côté des Lacédémoniens.

Chap. 108. La bataille se donna dans Tanagre, cité de Béotie. Les Lacédémoniens et leurs alliés furent vainqueurs ; mais de part et d’autre des flots de sang coulèrent. Les Lacédémoniens entrèrent dans la Mégaride, s’ouvrirent des chemins à travers les forêts, et retournèrent chez eux par la Géranie et l’isthme.

Soixante-deux jours après cette bataille, les Athéniens marchèrent contre les Béotiens sous le commandement de Myronidès, et les ayant battus à Énophytes, ils se rendirent maîtres de la Béotie et de la Phocide, rasèrent le mur des Tanagréens, prirent en otage les cent plus riches personnages d’entre les Locriens d’Oponte, et terminèrent leurs longues murailles. Les Éginètes capitulèrent ensuite avec eux, rasèrent leurs fortifications, livrèrent leurs vaisseaux et se soumirent à un tribut fixe pour l’avenir. [Rival de Myronidès] Tolmidès, fils de Tolmæus, avait infesté les côtes du Péloponnèse, brûlé le havre des Lacédémoniens, et pris Chalcis [ville d’Acarnanie, alors dépendante] de Corinthe ; puis, effectuant une descente, il avait battu les Sicyoniens.

Chap. 109. Quant aux Athéniens et leurs alliés qui étaient passés en Égypte, ils s’y trouvaient encore : la guerre y prit pour eux bien des faces différentes. D’abord ils se rendirent maîtres de l’Égypte. Artaxerxès fit passer à Lacédémone le perse Mégabaze, avec de l’argent, pour engager les peuples du Péloponnèse à se jeter sur l’Attique : ce qui forcerait les Athéniens à sortir de l’Égypte. Mais, après d’inutiles dépenses, Mégabaze retourna dans la haute Asie avec le reste des trésors qu’il avait apportés. Le roi envoya, avec une puissante armée, un autre Perse, nommé aussi Mégabaze, fils de Zopyre. Il arriva par terre, battit les Égyptiens et les alliés, chassa les Hellènes de Memphis, et finit par les renfermer dans l’île Prosopitide. Il les assiégea pendant dix-huit mois, jusqu’à ce qu’ayant desséché le fossé et donné aux eaux un autre cours, il mit les vaisseaux à sec, changea une grande partie de l’île en terre ferme, y passa de pied, et s’en rendit maître.

Chap. 110. Ainsi furent ruinées, dans ce pays, les affaires des Hellènes, après six ans de guerre. Les faibles restes d’une nombreuse armée se sauvèrent à Cyrène, en passant par la Libye. La plupart périrent, et l’Égypte retourna sous la domination du grand roi. Seulement Amyrtée s’y conserva une souveraineté dans les marais. Leur vaste étendue ne permettait pas de le prendre, et d’ailleurs ses sujets étaient les plus belliqueux des Égyptiens. Pour Inarus, ce roi des Libyens qui avait causé tout le trouble de l’Égypte, il fut pris par trahison et empalé.

Cinquante trirèmes d’Athènes et des alliés venaient succéder aux premières, et, dans l’ignorance de tout ce qui s’était passé, elles abordèrent à un bras du Nil nommé Mendesium. L’infanterie les attaqua par terre, la flotte des Phéniciens par mer : le plus grand nombre des bâtimens fut détruit ; le reste parvint à se sauver. Ainsi se trouva anéantie cette grande armée d’Athéniens et d’alliés qui était passée en Égypte.

Chap. 111. Orestès, fils d’Échécratidès, roi de Thessalie, chassé de cette contrée, engagea les Athéniens à l’y ré-