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THUCYDIDE, LIV. III.

taient avec nous ? — Ce sont elles, lui répondit-on, si du moins vous combattîtes hier à Idomène. — Nous n’eûmes hier affaire avec personne ; mais seulement avant-hier dans notre retraite. — Et nous, c’est hier que nous avons engagé une action avec ces hommes ; ils venaient d’Ampracie au secours des leurs. »

À ces mots, le héraut comprit que le secours venu de la ville avait été défait ; il jeta un profond soupir, et, frappé des maux de sa patrie, il se retira aussitôt sans remplir sa mission et sans réclamer les morts. C’est, dans le cours de cette guerre, la plus grande perte qu’ait éprouvée une ville hellénique en aussi peu de jours. Je n’ai pas écrit le nombre des morts ; ce qu’on en rapporte est incroyable, eu égard à l’étendue de la ville. Mais je sais que si les Acarnanes et les Amphiloques eussent voulu croire les Athéniens et Démosthène, ils pouvaient d’emblée se rendre maîtres d’Ampracie ; sans doute ils craignirent que les Athéniens, s’en mettant en possession, ne devinssent pour eux des voisins trop difficiles.

Chap. 114. Les troupes d’Athènes eurent le tiers des dépouilles ; les villes alliées se partagèrent le reste : le butin des Athéniens fut perdu sur mer. Démosthène, plus heureux, ramena sur ses vaisseaux la part que lui avait faite l’armée ; trois cents armures complètes qu’on voit déposées dans les hiérons de l’Attique : c’était en même temps assurer son retour, devenu dangereux depuis son échec en Étolie.

Les Athéniens qu’avaient amenés les vingt vaisseaux, retournèrent à Naupacte. Après leur départ et celui de Démosthène, les Acarnanes et les Amphiloques permirent, sur la foi publique, aux Péloponnésiens réfugiés auprès de Salynthius, de se retirer des Éniades : ils conclurent même, dans la suite, avec les Ampraciotes, un traité d’alliance et d’amitié pour cent ans, à condition que les Ampraciotes ne s’uniraient pas aux Acarnanes contre les Péloponnésiens, ni les Acarnanes aux Ampraciotes contre les Athéniens, mais qu’ils se donneraient des secours pour défendre leurs pays respectifs ; que les Ampraciotes rendraient aux Amphiloques leurs places, et toute l’étendue de pays qu’ils avaient occupée sur leurs frontières, et qu’ils ne porteraient pas de secours à Anactorium, place ennemie des Acarnanes. Ce traité mit fin à la guerre. Les Corinthiens envoyèrent une garnison de trois cents hoplites à Ampracie, et Xénoclidas, fils d’Euthyclès, pour y commander. Ils eurent sur la route beaucoup de peine à traverser le continent. Telle fut la conclusion des affaires d’Ampracie.

Chap. 115. Les Athéniens qui étaient en Sicile, firent, le même hiver, une descente sur les côtes d’Himérée, de concert avec les Sicéliotes, qui, du haut de leurs montagnes, s’étant jetés sur les limites de ce territoire, passèrent dans les îles d’Éole. En retournant à Rhégium, ils rencontrèrent Pythodore, fils d’Isoloque, qui venait remplacer Lachès dans le commandement de la flotte athénienne. Les alliés de Sicile étaient allés à Athènes, et avaient obtenu un plus grand secours de vaisseaux. Leur pays étant sous le joug de Syracuses, et un petit nombre de bâtimens leur interdisant la mer, ils se préparaient à rassembler une flotte pour venger une insulte qu’ils ne pouvaient plus dissimuler. Les Athéniens équipèrent quarante vaisseaux, jugeant que c’était le moyen de mettre plus tôt fin à cette guerre, et voulant en même temps s’entretenir dans l’exercice de la marine. Ils expédièrent d’abord Pythodore seul, avec quelques bâtimens : Sophocle, fils de Sostratide,