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THUCYDIDE, LIV. V.

jusqu’à cette époque. Elle était encore rassemblée tout entière dans la Némée ; on voyait une levée en masse des Lacédémoniens ; on y remarquait aussi des Arcadiens, des Béotiens, des Corinthiens, des Sicyoniens, des Pellènes, des Phliasiens, des Mégariens, tous hommes d’élite de chaque nation, qui semblaient dignes de se mesurer, non seulement avec la confédération d’Argos, mais avec toute autre armée qui aurait pu s’y joindre. Ce ne fut donc pas sans un vif ressentiment contre Agis que ces troupes firent retraite et se séparèrent pour regagner leurs foyers.

Mais les Argiens étaient encore bien plus aigris contre ceux qui avaient traité sans le concours du peuple, croyant, eux aussi, que l’armée lacédémonienne venait de leur échapper dans une circonstance qui jamais ne se représenterait aussi favorable ; car on eut combattu près de la ville et avec l’aide de vaillans alliés. En revenant, ils allaient lapider Thrasylle dans le Charadrum, où, avant de rentrer, ils jugent les délits militaires, mais il se réfugia sur l’autel, et sauva sa vie ; ses biens furent confisqués au profit du public.

Chap. 61. Après cet événement, mille hoplites d’Athènes et trois cents hommes de cavalerie accoururent, commandés par Lachès et Nicostrate.

Les Argiens, qui, quoique mécontens, hésitaient à rompre la trève avec Lacédémone, les prièrent de s’en retourner. Quelque envie même que montrassent les Athéniens d’entrer en négociation, on ne les introduisit en présence du peuple qu’après y avoir été forcé par les prières des Mantinéens et des Éléens, qui ne s’étaient pas encore retirés.

Les Athéniens parlèrent par l’organe d’Alcibiade, leur député, au milieu des Argiens et des alliés d’Argos, et dirent qu’on n’avait pu traiter légalement sans le concours des puissances confédérées ; qu’ils arrivaient à propos et qu’il fallait faire la guerre. Leur discours persuada les confédérés, qui tous se portèrent à Orchomène d’Arcadie, excepté les Argiens. Ceux-ci, quoique persuadés par les représentations d’Alcibiade, restèrent d’abord en arrière, mais ensuite ils entrèrent en campagne. Tous campèrent devant Orchomène, l’assiégèrent d’un commun effort, et donnèrent des assauts à la place, dont ils voulaient se rendre maîtres, surtout parce que les Lacédémoniens y avaient déposé des otages d’Arcadie. La faiblesse des fortifications, le nombre des ennemis, effrayaient les Orchoméniens ; personne ne venant à leur secours, ils craignaient de périr faute d’assistance. Ils capitulèrent donc, à condition d’entrer dans la confédération, de donner des otages, et de remettre aux Mantinéens ceux que Lacédémone avait déposés chez eux.

Chap. 62. Les confédérés, maîtres d’Orchomène, examinaient entre eux quelle place il convenait d’attaquer d’abord. Les Éléens voulaient que ce fût Lépréum ; et les Mantinéens, Tégée. Les Argiens et les Athéniens se joignirent à ceux de Mantinée. Les Éléens se retirèrent, offensés de ce qu’on ne se décidait pas pour le siége de Lépréum. Le reste des alliés fit, à Mantinée, ses dispositions comme pour entrer [sans coup férir] dans Tégée : quelques-uns même des Tégéates travaillaient dans l’intérieur de la place à les seconder.

Chap. 63. Les Lacédémoniens, après leur retour d’Argos et la conclusion de la trève de quatre mois, reprochèrent vivement à Agis de ne leur avoir pas soumis Argos, l’occasion s’en étant présentée plus belle qu’eux-mêmes n’eussent osé l’espérer ; car il n’était pas facile de rassembler des alliés si nombreux et d’un si grand courage. Mais, la nou-