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THUCYDIDE, LIV. VII.

vis des vingt vaisseaux d’Athènes qui étaient à Naupacte, attendant que les bâtimens de charge, sortis du Péloponnèse avec les hoplites, eussent passé des côtes de l’Hellade en Italie ; par cette raison, on les avait expédiés d’avance : on espérait que les vaisseaux de transport attireraient moins que les trirèmes l’attention des Athéniens.

Chap. 20. Pendant que les ennemis fortifiaient Décélie, les Athéniens, dès les premiers jours du printemps, envoyèrent sur les côtes du Péloponnèse trente vaisseaux sous le commandement de Chariclès, fils d’Apollodore, qui avait ordre de passer à Argos, pour inviter, conformément au traité d’alliance, les hoplites argiens à se rendre sur sa flotte. Ainsi qu’ils l’avaient décrété, ils firent partir pour la Sicile Démosthène, avec soixante vaisseaux d’Athènes, cinq de Chio, douze cents hoplites athéniens inscrits sur le rôle, en outre de ces deux îles, dont chacune en fournit le plus grand nombre possible. Ils tirèrent aussi d’autres alliés leurs sujets tout ce qu’ils purent se procurer d’objets utiles à la guerre. Démosthène eut ordre, avant tout, de se joindre à Chariclès, de longer avec lui les côtes de la Laconie et d’y exercer de concert des hostilités ; et il fit voile pour Égine, où il attendit que ce qui pouvait encore manquer de troupes fût arrivé, et que Chariclès eût pris avec lui les Argiens.

Chap. 21. En Sicile, à la même époque du printemps, Gylippe revenait à Syracuses, amenant, des différentes villes où il avait réussi, le plus de troupes qu’il avait pu lever. Il assembla les Syracusains, et leur dit qu’il fallait équiper le plus de vaisseaux qu’on pourrait, et hasarder un combat naval ; qu’il ne doutait pas qu’on ne fît des actions dignes du péril, et décisives pour le succès de ta guerre. Hermocrate le seconda, et contribua beaucoup à persuader qu’il ne fallait pas craindre d’attaquer les Athéniens sur mer. Il représenta que ce peuple lui-même n’avait pas reçu de ses pères l’art de la marine comme un héritage dont on ne pût le dépouiller ; qu’il était plus que les Syracusains un peuple de terre ferme, contraint par les Mèdes à devenir marin ; qu’avec des hommes audacieux, tels que les Athéniens, le moyen de se faire redouter était de montrer une audace égale ; que souvent les Athéniens, sans l’emporter en force, mais en attaquant avec témérité, remplissaient les autres de terreur, et qu’ils éprouveraient eux-mêmes ce qu’ils faisaient éprouver à leurs ennemis. Il était sûr, ajouta-t-il, que si contre leur attente, Syracuses osait opposer ses vaisseaux, elle les effraierait, et prendrait plus d’avantage que les Athéniens, par leur habileté, n’en auraient sur l’inexpérience de leurs ennemis. Il leur ordonna donc de s’essayer sur leur flotte sans balancer. Les Syracusains, persuadés par les discours de Gylippe, d’Hermocrate et de quelques autres, se disposent aussitôt avec ardeur à livrer un combat de mer, et équipent les vaisseaux.

Chap. 22. La flotte était prête : Gylippe, vers la nuit, à la tête de toute son armée de terre, marcha en personne aux lignes de Plemmyrium, tandis qu’au même signal trente-cinq trirèmes syracusaines du grand port se mettaient en mouvement, et que quarante-cinq du petit port, où était le chantier, tournaient la côte, voulant se réunir à la flotte du port de l’intérieur et attaquer Plemmyrium de concert, afin de jeter le désordre parmi les Athéniens de deux côtés à-la-fois. Quant à ces derniers, ils montèrent à la hâte soixante vaisseaux ; vingt-cinq voguèrent à la rencontre des trente-cinq vaisseaux syracusains du grand port, et le reste au-devant de