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THUCYDIDE, LIV. VIII.

même nombre aux Corinthiens ; dix aux Arcadiens, aux Pelléniens et aux Sicyoniens ; autant aux Mégariens ; aux Trézémiens, aux Épidauriens et aux Hermioniens. Ils firent toutes leurs dispositions pour ouvrir la campagne à l’entrée du printemps.

Chap. 4. Les Athéniens, comme ils l’avaient résolu, se procurèrent aussi, pendant l’hiver, des bois de construction, mirent des vaisseaux sur le chantier, et fortifièrent Sunium, pour que les bâtimens qui leur apporteraient des subsistances pussent, sans crainte de l’ennemi, doubler le promontoire sans danger. Ils abandonnèrent le fort qu’ils avaient élevé dans la Laconie, lorsqu’ils côtoyaient le Péloponnèse pour aller en Sicile, et tout ce qui leur paraissait entraîner des dépenses superflues, s’imposant une stricte économie, et s’appliquant surtout à prévenir la défection des alliés.

Chap. 5. Tandis qu’on agissait ainsi de part et d’autre, et qu’on se livrait aux apprêts de la guerre avec la même ardeur que si on la commençait, les peuples de l’Eubée, cet hiver même, furent les premiers à traiter avec Agis pour se détacher d’Athènes. Il accueillit leur proposition, et fit venir de Lacédemone, pour les commander, Alcamène, fils de Sthénélaïdas, et Mélanthe. Ils arrivèrent, amenant avec eux environ trois cents néodamodes. Agis travaillait à leur préparer le passage, quand les Lesbiens se présentèrent aussi dans le dessein de se soulever contre Athènes. Les Béotiens étaient d’intelligence avec eux, et Agis, à leur sollicitation, convint de suspendre l’exécution de ses projets contre l’Eubée, fit les dispositions nécessaires pour favoriser la défection des Lesbiens, et leur donna, pour diriger le complot, Alcamène, qui allait faire voile pour leur île : il agissait sans prendre les ordres des Lacédémoniens ; car tout le temps qu’il occupa Décélie, il fut maître, avec les forces qui lui étaient confiées, d’envoyer des troupes partout où il voulait et de les rappeler ensuite, et d’exiger des contributions en argent. On peut dire qu’à cette époque les alliés lui obéissaient bien plus qu’aux Lacédémoniens de Sparte : en effet, les forces qu’il avait à ses ordres le rendaient redoutable en tout lieu. Il embrassa les intérêts des Lesbiens. Les habitans de Chio et d’Érythres, non moins disposés à la défection, ne s’adressèrent point à lui, mais à Lacédémone. On remarquait parmi eux un envoyé de Tissapherne, qui gouvernait les provinces maritimes au nom de Darius, fils d’Artaxerxès. Tissapherne excitait les Péloponnésiens à la guerre, et promettait de pourvoir à la subsistance de l’armée. Le roi venait de lui demander les tributs arriérés de sa satrapie, qu’il ne pouvait, à cause des Athéniens, se faire payer des villes helléniques. Il espérait, quand il aurait humilié Athènes, toucher plus aisément ses contributions, amener les Lacédémoniens à l’alliance du roi, et lui envoyer, mort ou vif, suivant l’ordre de ce prince, Amorgès, bâtard de Pissuthnès, qui s’était révolté dans la Carie. Les habitans de Chio et Tissapherne agirent de concert.

Chap. 6. Vers le même temps, Calligite, fils de Laophon de Mégares, et Timagoras, fils d’Athénagoras de Cyzique, tous deux exilés, et qui avaient trouvé un asile auprès de Pharnabaze, fils de Pharnace, arrivent à Lacédémone. Pharnabaze les députait pour engager cette république à envoyer une flotte sur l’Hellespont, et afin encore, ce que Tissapherne avait fort à cœur, de soulever contre Athènes, s’il était possible, les villes de son gouvernement pour en recevoir les tributs, et de se donner le mé-