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XÉNOPHON.

lieux que le roi doit traverser ; et il n’est permis qu’aux personnes de considération de passer entre ces barrières. Elles étaient gardées par des mastigophores, pour frapper quiconque causerait du désordre. Un corps de quatre mille doryphores était rangé en face du palais, sur quatre de hauteur, deux mille à chaque côté des portes. Toute la cavalerie s’était rendue dans la même place, et avait mis pied à terre, les soldats tenant leur mains cachées sous leurs manteaux, ce qui s’observe de nos jours, toutes les fois qu’on est en présence du roi. Les Perses occupaient la droite du chemin, les alliés la gauche : les chars étaient pareillement rangés des deux côtés en nombre égal. Les portes du palais ouvertes, sortirent d’abord quatre taureaux superbes, qui devaient être immolés à Jupiter et aux autres divinités désignées par les mages. C’est une maxime chez les Perses, que dans ce qui concerne le culte des Dieux, on doit surtout consulter ceux qui sont voués à leur service. Après les taureaux, venaient les chevaux qu’on devait sacrifier au Soleil ; ensuite un char blanc à timon doré : il était orné de fleurs, et consacré à Jupiter. Suivait un autre char blanc, orné aussi de fleurs ; celui-là était consacré au Soleil ; enfin, un troisième, dont les chevaux avaient des housses couleur de pourpre, et derrière lequel marchaient des hommes portant du feu dans un grand bassin.

Parut enfin Cyrus lui-même, monté sur son char, la tête couverte d’une tiare qui s’élevait en pointe ; vêtu d’une tunique mi-partie de pourpre et de blanc, habillement réservé au roi seul, d’un haut-de-chausse d’une couleur vive, et d’un manteau de pourpre. Sa tiare était ceinte du diadème, que portaient aussi ceux qu’il honorait du titre de cousins, et que portent encore ceux qui jouissent de la même distinction. Il avait les mains découvertes : à ses côtés était assis le conducteur du char, homme d’une taille avantageuse, mais qui semblait inférieure à la sienne. Dès qu’on vit Cyrus, tous l’adorèrent en se prosternant : peut-être des gens apostés en donnèrent-ils l’exemple ; peut-être fut-ce l’effet ou de la surprise que causait un spectacle si nouveau, ou de l’admiration qu’excitaient et sa grande renommée et son air majestueux. Ce qui est certain, c’est que jusqu’à ce jour aucun Perse ne lui avait rendu de tels hommages.

Dès que le char fut sorti du palais, les quatre mille doryphores se mirent en marche, deux mille à chaque côté de ce char. Environ trois cents eunuques richement vêtus, et armés de dards, les suivaient à cheval : après eux on menait en main deux cents chevaux de ses écuries, ornés de freins d’or, et couverts de housses rayées. Ils étaient suivis de deux mille piquiers, après lesquels marchait, sous la conduite de Chrysante, le plus ancien corps de cavalerie perse, composé de dix mille hommes rangés sur cent de front et cent de hauteur ; après ce premier corps, un second de dix mille autres cavaliers perses, dans le même ordre, commandés par Hystaspe ; après celui-ci, un troisième de pareil nombre, dont Datamas était le chef ; enfin, un quatrième commandé par Gadatas. Ensuite venaient les cavaliers Mèdes, puis les Arméniens, les Cadusiens, les Saces. Derrière la cavalerie étaient les chars, rangés sur quatre de front, et conduits par le perse Artabate.

Tandis que Cyrus marchait dans cet ordre, une grande multitude le suivait en dehors des barrières. Comme on lui présentait différentes requêtes, il en-