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ARRIEN, LIV. IV.

lonté des Dieux, et non ce qu’il vous plairait d’entendre. »

Néanmoins tout étant disposé pour le passage, les troupes sous les armes aux bords du fleuve, Alexandre fait jouer les machines : quelques Scythes sont blessés ; un d’entre eux, atteint par un trait terrible qui perce le bouclier et la cuirasse, tombe de cheval ; épouvantés, les autres reculent.

Alexandre, profitant de leur désordre, fait sonner les trompettes, se jette le premier dans le fleuve, toute son armée le suit : il fait traverser d’abord les frondeurs et les archers pour empêcher, à coups de traits, les Scythes d’approcher la phalange dans son passage, avant que toute la cavalerie fût à l’autre bord.

Toute l’armée ayant traversé le fleuve, il détache contre les Scythes un corps de chevaux alliés, et quatre escadrons de Sarissophores. L’ennemi bien plus nombreux soutient leur choc, les tourne avec sa cavalerie, les accable de traits, et se replie en bon ordre. Les archers, les Agriens et l’infanterie légère, sous les ordres de Balacre, volent à leur secours. Dès qu’on en fut aux mains, trois corps d’Hétaires et les archers à cheval viennent les soutenir. Alexandre donne lui-même de front avec toute sa cavalerie ; l’ennemi serré de près par les hommes et les chevaux, ne pouvait plus voltiger et se développer comme auparavant. Il prend la fuite, laisse mille morts sur le champ de bataille, dont Satrace, un de leurs chefs, et cent cinquante prisonniers. L’armée qui se met à la poursuite des fuyards, souffre beaucoup de la chaleur et de la soif. Alexandre lui-même ayant calmé la sienne avec l’eau mal saine du pays, en fut très incommodé ; les Macédoniens furent arrêtés par cet accident auquel les Scythes durent leur salut.

Alexandre, dangereusement malade, fut reconduit au camp : ainsi se confirma le présage d’Aristandre.

Chap. 2. Peu de temps après le roi des Scythes députe vers le conquérant pour réparer l’outrage fait aux Grecs : on ne devait point l’attribuer au corps de la nation Scythe, mais à quelques brigands qui ne vivent que de rapines ; du reste, on lui offre toute satisfaction. Il eût été d’abord honteux pour Alexandre de paraître soupçonner la sincérité du roi Scythe sans en tirer vengeance, ensuite le moment n’était point favorable pour en appeler aux armes ; il reçut donc avec bienveillance les députés.

Cependant les Macédoniens assiégés à Maracanda, pressés par l’ennemi, font une sortie, en tuent quelques uns, repoussent les autres et rentrent dans la place sans aucune perte.

Spitamène apprend l’approche des Grecs qui venaient au secours des leurs, lève le siége et se retire vers les frontières de la Sogdiane. Pharnuque, empressé de l’en chasser, vole à sa poursuite avec les siens, et, contre son attente, rencontre les nomades Scythes réunis à Spitamène, au nombre de six cents chevaux. Ranimé par ce renfort, Spitamène range les siens en bataille dans une plaine déserte de la Scythie, non qu’il y voulût attendre Pharnuque, ni fondre sur lui, mais pour harceler l’infanterie ennemie avec les voltigeurs de sa cavalerie. Il évite facilement l’approche des chevaux grecs, les siens étant plus légers, plus frais et plus robustes que ceux d’Andromaque, déjà épuisés par de longues routes, et par le manque de fourrages. Il presse donc vivement les Grecs, soit qu’ils résistent, soit qu’ils reculent ; quelques-uns tombent percés de flèches, beaucoup d’autres étant blessés, les Macédoniens se retirent en formant le carré long (Plésion) près du fleuve Polytimète vers une forêt qui en

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