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sul détacha dix turmes de cavalerie légère, avec mille vélites, ordonnant de parcourir les hauteurs et d’aller aussi loin qu’on pourrait à la découverte.

La pluie avait cessé ; mais il se répandit un brouillard si épais, qu’on ne pouvait distinguer les objets. Le détachement romain avançant pour ainsi dire à tâtons, donna dans les troupes de Philippe. Les Macédoniens, mieux postés, peut-être se croyant aussi les plus forts, chargèrent avec tant d’impétuosité qu’ils mirent l’ennemi en fuite après lui avoir fait essuyer une perte considérable.

Le général romain, moins affecté de cet échec qu’attentif à saisir l’occasion d’engager un combat sur ce terrain où il avait tout l’avantage, détacha d’abord deux tribuns chacun à la tête de mille hommes, avec cinq cents chevaux étoliens. L’infanterie légionnaire s’avança vers les hauteurs, conservant ses intervalles entre les manipules, pour donner aux fuyards les moyens de se retirer derrière et de s’y rallier.

À leur approche, les Macédoniens s’arrêtèrent. Malgré leur infériorité, ils soutinrent quelque temps le combat avec courage ; enfin, ils reculèrent vers le sommet des montagnes, d’où ils prévinrent le roi qu’ayant sur les bras les Romains en plus grand nombre, ils n’éviteraient point une défaite totale si ce prince ne les secourait au plus tôt.

Le roi, très mécontent d’un incident qui menaçait de l’engager plus loin qu’il n’avait dessein de le faire, détacha cependant Héraclides et Léontes, l’un à tête de la cavalerie thessalienne, et l’autre avec un corps de cavaliers macédoniens. Mille hommes d’infanterie étrangère, commandés par Athénagore se joignirent à eux. Leur ordre fut positif : ils devaient se contenter de dégager les troupes légères, et ne pas se laisser entraîner trop avant, afin d’éviter une action générale.

Ces détachemens trouvèrent les soldats légers qui se maintenaient avec beaucoup de peine ; ils se réunirent, et donnèrent ensemble sur les Romains avec tant d’impétuosité qu’ils les renversèrent. Vélites, Étoliens, légionnaires, tout fut culbuté. La déroute aurait été plus grande, si la cavalerie étolienne, qui s’exposait partout où celle des Macédoniens ne pouvait gagner le pas sur elle, n’eût souvent tenu tête à l’infanterie, et favorisé la retraite des Romains.

Q. Flaminius apercevant ce qui se passait sur les hauteurs, fut d’abord un peu décontenancé d’une défaite qu’il n’avait pas prévue. Il sortit de suite son armée du camp, et la rangea en bataille au pied des montagnes, la gauche vis-à-vis la pente sur laquelle ses détachemens étaient montés. Les Romains étaient formés sur trois lignes par manipules[1].

Les généraux de la droite reçurent l’ordre d’agir selon les circonstances, et de détacher plusieurs corps pour gagner des postes détournés qui pourraient servir à prendre l’ennemi à dos et en flanc, si l’action devenait générale. Devant cette droite Q. Flaminius jeta ses éléphans ; car depuis les guerres contre Carthage, on essayait d’employer ces animaux dans les armées romaines. Le proconsul n’en mit point devant sa gauche, craignant que ses escarmoucheurs ne se retirassent en désordre ; cependant il la renforça des vélites qui n’avaient point combattu sur la hauteur. Ce qui lui restait de cavalerie fut réparti aux deux ailes.

On ignorait encore quel parti prendrait Philippe. Une division considérable

  1. Voyez l’Atlas.

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