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bagages filaient alors du côté opposé.

On trouve, il est vrai, chez les Grecs, quelques exemples de marches faites sur plusieurs colonnes. Alexandre ordonna la sienne en diphalangie ou phalange doublée, lorsqu’il s’approcha du Granique pour en forcer le passage ; Machanidas allant combattre Philopœmen, était sur trois colonnes ; et ce fut avec une disposition semblable que Philopœmen sortit de Mantinée pour se mettre en bataille ; enfin Thucydide nous apprend que la troisième année de la guerre du Péloponnèse, les Lacédémoniens et leurs alliés s’avancèrent aussi sur trois colonnes en allant vers Stratos, ville d’Arcanie, lorsque celle du centre tomba dans une embuscade où elle fut très maltraitée. Mais ces sortes de marches sont rares chez les Grecs. Les déploiemens de leurs colonnes de route devenaient d’ailleurs très faciles, même dans les armées les plus nombreuses.

Il n’en est pas de même des Romains qui, n’étant pas rangés dans un ordre serré, ni sur une profondeur égale à celle des Grecs, admettaient des intervalles sur le front, et se formaient ordinairement sur plusieurs lignes. Il fallait plus d’art pour combiner un mouvement latéral entre des parties si différemment liées.

Bien, que la légion eût commencé seulement à changer son ordonnance vers le temps de Marius, nous l’avons dit, antérieurement et dans certaines circonstances, on réunissait un manipule de hastaires, un de princes, un de triaires, pour en former une cohorte ; mais la différence des armes ne permettant pas de mettre ces trois sortes de combattans sur le même front, les quatre premiers rangs de cette cohorte étaient occupés par les hastaires, les quatre rangs suivans se composaient des princes, et les deux derniers des triaires. Ou bien, les hastaires se plaçaient aux huit premiers rangs de la droite, les princes aux huit rangs de la gauche, et les triaires occupaient encore les deux derniers rangs.

Ainsi, on connaissait la cohorte dès le temps de Polybe. Cette disposition, il est vrai, n’était pas celle dont on se servait habituellement pour combattre ; mais on l’employait dans les marches, lorsque le terrain ne permettait pas de former trois colonnes.

Que l’on s’avançât, au reste, par cohortes ou par manipules, la marche s’ouvrait toujours de la même manière. Les extraordinaires faisaient l’avant-garde. Ce corps consistait en autant de cohortes qu’il y avait de légions dans l’armée, on le tirait des troupes alliées, et l’on joignait à cette infanterie quatre cents cavaliers ou le tiers de la cavalerie des alliés, dans une armée consulaire forte de quatre légions.

Après les extraordinaires, venait la première légion des alliés, en commençant par la droite ; les deux légions romaines défilaient ensuite, puis l’autre des alliés. Chaque légion était suivie de ses bagages, portés par des bêtes de somme. La cavalerie marchait quelquefois à la queue de la légion dont elle dépendait ; d’autres fois, elle côtoyait la colonne pour contenir et assurer les bagages, ou bien elle se tenait à la tête et à la queue. Quand on faisait une retraite, les extraordinaires formaient l’arrière-garde.

Les armés à la légère étaient employés à éclairer la marche. On détachait aussi de petits corps de cavalerie que l’on nommait éclaireurs (exploratores), et qui se portaient assez loin en avant pour battre le pays.

Si l’ennemi paraissait et qu’il fallût combattre, les équipages se retiraient à