Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/523

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
515
POLYBE, LIV. IV.

tiens, les Arcadiens et les Thessaliens. Les Achéens dirent cependant qu’ils feraient marcher des troupes à leur secours, pourvu néanmoins qu’ils donnassent leurs enfans en ôtage et les missent en dépôt à Lacédémone, pour assurance que jamais ils ne feraient la paix avec les Étoliens sans le consentement des Achéens. Les Lacédémoniens mirent aussi des troupes en campagne, en qualité d’alliés, et campèrent sur les frontières des Mégalopolitains, mais moins pour y faire l’office d’alliés que pour être spectateurs de la guerre et voir quel en serait l’événement.

Quand Aratus eut ainsi disposé tout ce qui regardait les Messéniens, il envoya des députés aux Étoliens pour les instruire de ce qui avait été résolu, et leur ordonna de sortir des terres des Messéniens, et de ne pas mettre le pied dans l’Achaïe, sous peine d’être traités comme ennemis. Aussitôt Scopas et Dorimaque, sachant que les Achéens étaient sous les armes, et ne jugeant pas qu’il fût de leur intérêt de désobéir aux ordres de cette république, envoyèrent des courriers à Cylène pour prier Ariston, préteur des Étoliens, de faire conduire à l’île de Philias, tous les vaisseaux de charge qui étaient sur la côte, et partirent deux jours après avec leur butin, prenant leur route vers le pays des Éléens, dont les Étoliens avaient toujours été fort amis, parce que par leur moyen le Péloponnèse leur était ouvert pour y piller et y faire du butin.

Aratus différa deux jours de se mettre en marche, croyant légèrement que les Étoliens quitteraient le pays, comme ils en avaient fait semblant. Il congédia même l’armée des Achéens et les troupes de Lacédémone ; et, ne se réservant que trois mille hommes de pied, trois cents chevaux, et les troupes que commandait Taurion, il s’avança vers Patras, ne voulant qu’inquiéter les Étoliens. Dorimaque, informé qu’Aratus le suivait de près avec un corps de troupes, fut assez embarrassé : d’un côté il craignait que les Achéens ne fondissent sur lui pendant qu’il s’embarquerait et que ses troupes seraient dispersées : mais comme de l’autre il ne souhaitait rien tant que d’allumer la guerre, il fit accompagner le butin par les gens qu’il jugea propres à cette escorte et leur donna ordre de le mener droit à Rios, comme devant là s’embarquer ; puis, marchant lui‑même d’abord vers le même endroit, comme pour escorter le butin, il se détourna tout d’un coup, et prit sa route vers Olympie.

Sur l’avis qu’il reçut là, que Taurion était près de Clitorie, voyant bien que son butin ne pourrait partir de Rios sans péril et sans combat, il crut ne pouvoir mieux faire que d’attaquer sur‑le‑champ Aratus, qui n’avait que fort peu de troupes, et qui ne s’attendait à rien moins qu’à une bataille. Car il pensait en lui‑même que s’il était assez heureux poux vaincre, il aurait du temps de reste pour ravager le pays et partir de Rios sans danger, pendant qu’Aratus prendrait de nouvelles mesures pour rassembler ses Achéens ; ou que, si ce préteur n’osait en venir aux mains, il lui serait encore aisé de se retirer quand il le jugerait à propos. Plein de ces pensées, il se mit en marche et vint camper près de Méthydrion, dans le pays des Mégalopolitains. Le voisinage de l’ennemi étourdit si fort les chefs des Achéens, qu’on peut dire qu’ils en perdirent la tête. Quittant Clitorie, ils campèrent proche Caphyes ; et, pendant que les Étoliens étaient en marche de Méthydrion, prenant le chemin d’Orchomène, Aratus

33.