Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/602

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
594
POLYBE, LIV. V.

que l’autre, où il était en personne, se jeta dans la ville de Porphyréon, pour fermer par là, avec le secours de l’armée navale, l’entrée du pays à Antiochus.

Celui-ci vint d’abord à Marathe, où les Aradiens le vinrent trouver pour lui offrir leur alliance. Non-seulement il accepta leurs offres, mais apaisa encore une contestation qui divisait depuis quelque temps les Aradiens insulaires de ceux qui habitaient la terre-ferme. De là, entrant dans la Syrie par le promontoire appelé Théoprosopon, il prit Botrys, brûla Trière et Calame, et vint à Béryte. Il envoya de là Nicarque et Théodote en avant, pour occuper les défilés qui sont proche du Lyque. Ensuite il alla camper proche la rivière de Damure, suivi de près par mer de son armée navale que commandait en chef l’amiral Diognète. Ayant pris là Théodote, Nicarque et ses troupes légères, il marcha vers les défilés où Nicolas s’était déjà logé, et, après avoir reconnu la situation des lieux, il se retira dans son camp. Dès le lendemain, laissant au camp les soldats pesamment armés sous le commandement de Nicarque, il marche avec le reste de son armée vers l’ennemi qui, campé dans un terrain fort resserré, sur la côte, entre le pied du mont Liban et la mer, et, environné d’une hauteur rude et escarpée qui ne laisse le long de la mer qu’un passage étroit et difficile, avait encore mis bonne garde à certains postes et en avait fortifié d’autres, croyant qu’il lui serait aisé d’empêcher qu’Antiochus ne pénétrât jusqu’à lui.

Ce prince partagea son armée en trois corps. Il en donna un à Théodote, avec ordre de charger et de forcer les ennemis au pied du mont Liban ; Ménédéme avec le second avait ordre exprès de tenter le passage par le milieu de la hauteur ; le troisième fut posté sur le bord de la mer, Dioclès, gouverneur de la Parapotamie, à la tête. Le roi avec sa garde se plaça au milieu, pour être à portée de voir ce qui se passerait, et d’envoyer du secours où il serait nécessaire. Diognète et Périgène se disposèrent de leur côté à un combat naval. Ils s’approchèrent de la terre le plus qu’il leur fut possible, et tâchèrent de faire en sorte que leurs armées ne fissent ensemble qu’un même front. Le signal donné, on attaque de tous les côtés en même temps. Sur mer comme les forces étaient égales, on combattit avec égal avantage. Par terre la forte situation des postes que Nicolas occupait lui donna d’abord quelque supériorité ; mais quand Théodote eut rompu les ennemis qui étaient le long du Liban, et que d’en haut il fut ensuite tombé sur eux, toute l’armée de Nicolas s’enfuit en déroute. Deux mille furent tués en fuyant ; on n’en fit pas moins de prisonniers ; le reste se retira à Sidon. Périgène, qui commençait à espérer un heureux succès du combat naval, ne vit pas plus tôt la défaite de l’armée de terre, qu’il prit l’épouvante et se retira aussi au même endroit.

Antiochus vint camper devant Sidon ; mais il y avait tant de munitions dans cette ville, la garnison, jointe aux fuyards, y était si forte, que, n’osant tenter le siége, il prit le chemin de Philotérie, et envoya ordre à Diognète, amiral, de venir à Tyr. Philotérie est sur le lac où se jette le Jourdain, d’où sortant il traverse la plaine dans laquelle est située Scythople. On lui ouvrit de bon gré les portes de ces deux places, et cette nouvelle conquête lui donna de grandes espérances pour la suite ; car, comme tout le pays dépend de ces deux villes, il trouvait là aisément les vivres et toutes les autres mu-