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POLYBE, LIV. XXII.

retournent dans leur pays. Mais Alexandre dit qu’il ne donnerait qu’un talent, et que c’était encore beaucoup. Il refusa de se sauver à ce prix, et demeura dans la prison. Je crois que ce vieillard, qui était riche de plus de deux cents talens, aurait mieux aimé perdre la vie que d’en débourser trois. Tels sont les excès ou la fureur d’accumuler porte ceux qu’elle possède. Et cependant il fut si heureux dans son avarice, que dans la suite il fut applaudi et loué du refus déraisonnable qu’il avait fait ; car, peu de jours après, les lettres qu’on craignait de la part des Romains arrivèrent à Charandre, et il fut le seul qui recouvra sa liberté sans rançon. Les Étoliens, informés de son aventure, choisirent une seconde fois Damotèle pour leur ambassadeur à Rome, qui, ayant appris à Leucade, que M. Fulvius allait par l’Épire à Ambracie, désespéra du succès de son ambassade et retourna dans l’Étolie. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Les Étoliens, étant assiégés par le consul romain Marcus Fulvius, résistèrent vivement aux attaques des ouvrages et des béliers qu’il avait fait avancer. Le consul, après avoir fortifié son camp, fit construire contre Pyrrhée, dans la plaine, trois ouvrages avancés à quelque intervalle l’un de l’autre, mais dirigés sur la même ligne. Un quatrième fut construit du côté d’Esculapium, un cinquième contre la citadelle. Tous ces travaux étant conduits partout avec une grande vigueur et se rapprochant de la ville, ceux qui étaient renfermés dedans n’entrevoyaient qu’avec terreur les terribles dangers qui les menaçaient. Déjà les béliers frappaient puissamment les murailles ; déjà les machines armées de faux les nettoyaient. Les habitans mettaient tout en usage pour résister. À l’aide de leurs propres machines, ils lançaient contre les béliers des masses de plomb, des fragmens de rochers, des poutres de chêne. À l’aide d’anneaux de fer, ils tiraient à eux sur les parties inférieures de la muraille les faux des ennemis, de manière à briser l’appareil qui les portait et à s’emparer d’elles. Ils faisaient aussi de fréquentes sorties ; et tantôt en attaquant pendant la nuit les sentinelles qui protégeaient les travaux ; tantôt, en s’élançant avec audace pendant le jour contre les divers postes, ils retardaient les opérations du siége. (Hero, de Repellenda obsidione.) Schweighæuser.


Un jour que Nicandre était occupé hors la ville et y avait envoyé cinq cents cavaliers, ceux-ci se firent jour avec audace à travers un retranchement des ennemis et pénétrèrent dans la ville. Il leur avait prescrit de faire, à un jour fixé, une irruption sur l’ennemi. Lui-même leur avait promis qu’il les attaquerait au même instant du côté opposé et partagerait ainsi leur péril. Ceux-ci sortirent en effet avec vigueur de la ville et combattirent avec courage ; mais Nicandre n’ayant pas paru au moment fixé, soit par crainte du danger, soit par quelque occupation nécessaire qui l’empêcha de réaliser son premier projet, leur effort fut sans résultat. (Ibid.)


(On a vu toutefois beaucoup de villes, même après la destruction de leurs murailles, résister encore à l’ennemi, ainsi que l’a fait Ambracie.) À force de frapper sans interruption les murailles à coups répétés de bélier, les Romains parvenaient chaque jour à en démolir une partie. Ils ne purent cependant pé-