Aller au contenu

Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 3, 1840.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
81
guerre des gaules. — liv. v.

5. Après avoir ainsi pacifié cette partie de la Gaule, il dirige toutes ses pensées et tous ses projets vers la guerre de ceux de Trêves et Ambiorix. Dans cette vue il ordonne à Cavarinus de le suivre avec la cavalerie de Sens, de peur que son ressentiment contre ses concitoyens, ou la haine qu’ils lui portaient et qu’il s’était attirée, n’excitât quelque mouvement de ce côté. Ensuite n’ignorant pas qu’Ambiorix n’en viendrait jamais à une bataille, il examinait en lui-même quels autres desseins il pourrait avoir. Les peuples de la Gueldre étaient voisins des Liégeois, dont le pays est défendu par de grandes forêts et de grands marais, et qui seuls de toute la Gaule n’avaient jamais député vers César pour rechercher son amitié. César savait qu’Ambiorix était lié avec eux, et qu’il avait traité avec les Allemands par le moyen de ceux de Trêves. Il crut donc devoir lui enlever ces ressources, avant de l’attaquer, de peur que ne sachant où trouver un asile, il n’allât se cacher en Gueldre, ou se jeter entre les bras des peuples du Rhin. Après avoir pris ce parti, il envoya tous les bagages de l’armée à Labiénus dans le pays de Trêves, sous l’escorte de deux tégions, et marcha suivi des cinq autres contre ceux de Gueldre, qui, n’ayant point de troupes à lui opposer, se retirèrent avec tout ce qu’ils avaient dans leurs bois et dans leurs marais, où ils se croyaient en sûreté.

6. César partage ses troupes avec C. Fabius, un de ses lieutenans, et M. Crassus, son questeur ; ensuite il fit construire à la hâte plusieurs ponts, entra dans le pays ennemi par trois endroits, mit le feu partout, et enleva quantité d’hommes et de bestiaux. Par-là il réduisit cette nation à lui demander la paix. Après avoir reçu leurs otages, il leur déclara qu’il les traiterait en ennemis, s’ils donnaient retraite chez eux à Ambiorix ou à ses lieutenans. Cette affaire terminée, il laissa dans le pays Comius, seigneur d’Arras, avec de la cavalerie, pour contenir ce peuple dans le devoir, et marcha contre ceux de Trêves.

7. Tandis qu’il était occupé de ces expéditions, ceux de Trèves avaient assemblé un grand nombre de troupes, tant de cavalerie que d’infanterie, à dessein d’attaquer Labiénus, qui s’était établi en quartier d’hiver sur leur territoire avec une seule légion. Ils n’étaient plus qu’à deux jours de marche de son camp, lorsqu’ils apprirent que deux autres légions l’avaient joint par ordre de César ; ce qui les obligea de camper à cinq lieues de là, en attendant le secours des Allemands. Labiénus qui pénétra leur dessein, se flatta de pouvoir tirer avantage de leur témérité : dans cette vue, il laisse cinq cohortes à la garde de son camp, prend les vingt-cinq autres avec un corps nombreux de cavalerie, et vint camper à deux mille pas d’eux. Entre les deux camps il y avait une rivière difficile à traverser, parce que les bords en étaient escarpés. Labiénus n’avait nulle intention de la passer, et ne croyait pas non plus que les ennemis voulussent l’entreprendre ; car l’espérance du secours des Allemands augmentait de jour en jour. Dans cette conjecture, il déclara tout haut dans le conseil, que, sur le bruit qui courait de l’approche des Allemands, il ne jugeait pas à propos d’exposer sa personne ni son armée, et qu’en conséquence, il décamperait le lendemain à la pointe du jour. Ce discours ne tarda pas à être rapporté aux ennemis ; car dans notre cavalerie, presque toute composée de Gaulois, il y en avait quelques-uns qui ne pouvaient oublier