Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 5, 1844.djvu/521

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

servoit de retranchement en cet endroit.

» Ils avoient aussi préparé quantité d’artifices pour défendre la bresche, quantité de grenades et des bombes, des cercles, des gabions guéderonnez et plusieurs autres semblables.

» Outre cela, à chaque flanc il y avoit une pièce de canon pointée vers la bresche, qu’il fut impossible de démonter, à cause que les orillons les couvroient, encor qu’on les eust tellement rompus, qu’on pouvoit facilement monter en haut. »

On voit, par ces citations, que ce qui avait été prescrit par Louis XIII aux gouverneurs français, et ce qui l’a été depuis par la lettre de Louis XIV, avait été observé dans la défense d’Hesdin par le gouverneur espagnol. Il y avait cinq brèches au corps de place, et il avait trouvé moyen avec sa petite garnison de faire faire des retranchemens à chacune d’elles. Les assiégeans avaient inutilement tenté de s’y loger, ils en avaient été repoussés vigoureusement, et tout était disposé pour soutenir au besoin une attaque générale de vive force, sans compromettre le salut des habitans.

Cependant cette défense est plutôt sage que brillante ; elle aurait pu être poussée beaucoup plus loin, et peut-être l’eût-elle été, comme l’assurèrent les assiégés après la capitulation, si la poudre, qu’ils avaient inutilement consommée dans les commencemens, ne leur eût manqué.

Néanmoins, puisque cette défense satisfait à ce qui a été prescrit depuis par la lettre de Louis XIV, on peut conclure que le devoir qu’elle impose n’est rien moins qu’excessivement sévère. Et en effet, il est bien en arrière de ce qui se pratiquait chez les anciens, de ce qu’on a vu encore dans un grand nombre de sièges qui ont eu lieu seulement depuis Charlemagne, avant et après l’invention de la poudre, du temps même de Louis XIV, et postérieurement à lui et lorsqu’on pense que cette circulaire a été provoquée par le maréchal de Vauban, l’homme le plus philanthrope peut-être de tout le siècle d’alors, on ne peut s’empêcher de demeurer convaincu, que cette mesure était indispensable, et peut-être insuffisante. Ce grand ingénieur, non moins illustre par ses travaux pour l’administration civile, que par ses exploits militaires, ajoute, à cette circulaire rapportée dans son Traité de la défense des Places, les réflexions suivantes.

« Traité de l’attaque et de la défense des places. »

« La plupart des places mal défendues l’ont moins été par le peu de courage des gouverneurs que parce qu’ils n’en ont pas entendu la défense. La raison de cela, c’est que tous les gouvernemens sont donnés ou achetés ceux qui sont donnés, le sont ordinairement à de vieux officiers pour récompense de leurs services, sans faire beaucoup d’attention à leur capacité, que l’on suppose plutôt telle qu’elle devrait être, qu’on ne la connaît, en quoi l’on se trompe fort. Beaucoup de ces officiers, qu’un peu de faveur a aidés à faire le chemin, ne songent guère qu’à faire leur cour, et à faire valoir leur gouvernement, pour avoir de quoi subsister une partie de l’année à Paris et à la cour où ils résident le plus qu’ils peuvent. Sont-ils obligés de venir dans leur place ? c’est à condition de n’y demeurer que le moins qu’ils pourront, et sur le pied d’y tenir table de jeu, de bonne chère, et d’aller en vi-