Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 5, 1844.djvu/840

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en entier, du moins en grande partie, c’est alors une invasion ; si elle ne s’applique qu’à t’attaque d’une province, ou d’une ligne de défense plus ou moins bornée, c’est alors une offensive ordinaire ; enfin, si ce n’est qu’une attaque sur une position quelconque de l’armée ennemie, et bornée à une seule opération, cela s’appelle l’initiative des mouvemens[1]. L’offensive, considérée moralement et politiquement, est presque toujours avantageuse, parce qu’elle porte la guerre sur le soi étranger, qu’elle ménage son propre pays, diminue les ressources de l’ennemi, et augmente les siennes ; elle élève le moral de l’armée et impose souvent la crainte à son adversaire ; cependant il arrive aussi qu’elle excite son ardeur, lorsqu’elle lui fait sentir qu’il s’agit pour lui de sauver la patrie menacée.

Sous le rapport militaire, l’offensive a son bon et son mauvais côté ; en stratégie, si elle est poussée jusqu’à l’invasion, elle donne des lignes d’opérations étendues en profondeur, qui sont toujours dangereuses en pays ennemi. Tous les obstacles d’un théâtre d’opérations ennemi, les montagnes, les fleuves les déniés, les places de guerre, étant favorables à la défense, sont aussi contraires l’offensive les habitans et les autorités du pays seront hostiles à l’armée envahissante, au lieu d’être des instrumens ; mais si cette armée obtient un succès, elle frappe la puissance ennemie jusqu’au cœur, la prive de ses moyens de guerre, et peut amener un prompt dénouement de la lutte.

Appliquée à une simple opération passagère, c’est-à-dire considérée comme initiative des mouvemens, l’offensive est presque toujours avantageuse. surtout en stratégie. En effet, si l’art de la guerre consiste à porter ses forces au point décisif, on comprend que le premier moyen d’appliquer ce principe sera de prendre l’initiative des mouvemens. Celui qui a pris cette initiative sait d’avance ce qu’il fait et ce qu’il veut ; il arrive avec ses masses au point où il lui convient de frapper. Celui qui attend est prévenu partout ; l’ennemi tombe sur des fractions de son armée il ne sait ni où son adversaire veut porter ses. efforts, ni les moyens qu’il doit lui opposer.

En tactique, l’offensive a aussi des avantages ; mais ils sont moins positifs, parce que les opérations n’étant pas sur un rayon aussi vaste, celui qui a l’initiative ne peut pas les cacher à l’ennemi, qui, le découvrant à l’instant. peut, à l’aide de bonnes réserves, y remédier sur-le-champ. Outre cela, celui qui marche à l’ennemi a contre lui tous les désavantages résultant des obstacles du terrain qu’il devra franchir pour aborder la ligne de son adversaire, ce qui fait croire qu’en tactique surtout, lest chances des deux systèmes sont assez balancées.

Au reste, quelques avantages que l’on puisse se promettra de l’offensive sous le double rapport stratégique et politique, il est constant qu’on ne saurait adopter ce système exclusivement pour toute la guerre, car il n’est pas même certain qu’une campagne, commencée offensivement ne dégénère en lutte défensive.

La guerre défensive, comme nous l’avons déjà dit, a aussi ses avantages lorsqu’elle est sagement combinée ; eue est de deux espèces : la défense

  1. Cette distinction paraîtra trop subtile je la crois juste sans y attacher un grand prix. Il est certain que l’on peut prendre l’initiative d’une attaque pour une demi-heure, tout en suivant en général le système défensif.