Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/176

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Fatigués d’une station de six heures, les bataillons s’étaient ébranlés, tambour en avant. Plusieurs milliers d’hommes débouchent dans la Cannebière et, par la rue Saint-Féréol, se présentent devant la préfecture. Les délégués du club parlementent ; un coup de feu part. La foule se rue, arrête le préfet, ses deux secrétaires et le général Ollivier. Gaston Crémieux paraît au balcon, parle des droits de Paris, recommande le maintien de l’ordre. La foule applaudit et continue d’envahir, cherche, veut des armes. Crémieux organise deux colonnes, les envoie aux forges et chantiers de Menpenti qui livrèrent leurs fusils.

On forme, dans le tumulte, une commission de six membres : Crémieux, Job, Etienne, portefaix, Maviel, cordonnier, Guillard, ajusteur, Allerini. Elle délibère au milieu de la foule. Crémieux propose de mettre en liberté l’amiral et les autres. Le peuple veut qu’ils restent comme garantie. L’amiral est conduit dans une pièce voisine, gardé à vue. On lui demande sa démission, singulière manie de tous ces mouvements populaires. Cosnier, tout à fait désorienté, signe en brave homme qui veut épargner le sang. Quelques mois plus tard, injurié par les réactionnaires et craignant qu’on n’interprétât cette démission à lâcheté, il se brûla la cervelle.

La commission fit afficher qu’elle concentrait dans ses mains tous les pouvoirs, et, sentant bien qu’elle devait élargir sa base, invita le conseil municipal et le club de la garde nationale à lui envoyer chacun trois délégués. Le conseil désigna David Bosc, Desservy et Sidore ; le club, Bouchot, Cartoux et Fulgéras. Le lendemain, ils firent une proclamation modérée : « Marseille a voulu prévenir la guerre civile provoquée par les circulaires de Versailles. Marseille soutiendra le Gouvernement républicain régulièrement constitué qui siégera dans la capitale. La commission départementale formée avec le concours de tous les groupes républicains, veillera sur la République jusqu’à ce qu’une nouvelle autorité émanée d’un gouvernement régulier, siégeant à Paris, vienne la relever. »

Les noms du conseil municipal et du club rassurèrent la bourgeoisie moyenne. Les réactionnaires continuaient de rentrer la tête. L’armée avait évacué la ville pendant