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rejoindre. On parle de vérifier les élections d’après telle ou telle loi. Les plus ardents n’ont pas besoin de loi, proposent l’ordre du jour, déclarent que cette assemblée est révolutionnaire, ne veulent pas surtout de séances publiques. Danton, à l’ouverture de la Convention, avait fait justice d’une motion identique ; elle choque à la Commune. Arthur Arnould : « Nous ne sommes pas le conseil d’une petite commune ». — « Nous sommes un conseil de guerre, riposte Paschal Grousset, nous n’avons pas à faire connaître nos décisions à nos ennemis. » Plusieurs, Jourde, Theisz : « Toujours il faut être responsable ». Ranc fait ajourner au lendemain. Loiseau-Pinson demande l’abolition de la peine de mort en toutes matières. On reparle des élections ; les mandats de député et de membre de la Commune doivent être incompatibles, disent Vallès, Jourde, Theisz. Là-dessus, Tirard, qui se contenait mal devant le tumulte des propositions, demande la parole : « Mon mandat, dit-il, est purement municipal ; puisqu’on a parlé d’abolition de lois et d’une Commune conseil de guerre, je ne suis pas en droit de rester ; quant au double mandat, c’est avant qu’il fallait imposer la résiliation », et il enveloppe sa démission d’une ironie : « Je vous laisse mes vœux sincères, puissiez-vous réussir dans votre tâche. » Ce persiflage, l’évidente mauvaise foi irritent. Lefrançais rejette la démission, veut l’invalidation du mandat ; ceux qui ne peuvent se contenir parlent d’arrestation. On laisse Tirard libre parce qu’il avait dit à la tribune versaillaise : « Quand on entre à l’Hôtel-de-Ville on n’est pas sûr d’en sortir. »

Au contraire de Tirard, Cournet donne sa démission de député et Delescluze explique pourquoi il ne s’est pas démis à Bordeaux ; il est prêt aujourd’hui. Les motions recommencent. Ordre est donné de confier les portes de Passy et d’Auteuil aux gardes nationaux fidèles. Lefrançais revient dire que les délégués du Comité Central font demander à quelle heure il pourra, le lendemain, venir déposer ses pouvoirs. Enfin on arrive à fixer l’ordre du jour de la prochaine séance.

Le vieux beffroi sonne minuit. L’assemblée se lève en criant : « Vive la République ! Vive la Commune ! »