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grand mouvement. On connaissait les préfets républicains de M. Thiers. La commission, découragée, laissait rédiger le télégramme, quand on vit entrer Landeck, Amouroux et May envoyés, dirent-ils, par Paris.

Les ardents de la commission s’exaltèrent au nom de Paris victorieux. Au contraire, le conseil municipal décida de maintenir sa résolution et il en fit part, à minuit, au club de la garde nationale qui l’imita. À une heure et demie du matin, les délégués du club informèrent la commission que leurs pouvoirs avaient cessé. La bourgeoisie libérale lâchait pied, les radicaux se dérobaient, le peuple restait seul pour faire face à la réaction.

C’est la seconde phase de ce mouvement. Le plus enfiévré des trois délégués, Landeck, devint l’autorité de la commission. Les républicains, qui savaient ses platitudes au procès de l’Internationale, soupçonnèrent un bonapartiste sous le bravache. Ce n’était en réalité qu’un cabotin de foire, ne doutant de rien parce qu’il ignorait tout. La situation devenait tragique avec ce saltimbanque en tête. Gaston Crémieux, ne sachant pas trouver d’autre issue, tenait pour la solution de la veille. Le 28, il écrivit au conseil que la commission était prête à se retirer en lui laissant la responsabilité des événements, et il pressa ses collègues d’élargir les otages. Il n’aboutit qu’à devenir suspect de modérantisme et, fatigué de ces disputes, le soir il quitta la préfecture. Son départ découvrait complètement la commission. Elle parvint à trouver sa retraite, fit appel à son dévouement, le ramena à la préfecture reprendre son singulier rôle de chef captif et responsable.

Le conseil municipal ne répondit pas à la lettre de Crémieux. Le 29, la commission renouvela sa proposition. Le conseil se tut encore. Le soir, quatre cents délégués de la garde nationale, réunis au Musée, décidèrent de fédérer les bataillons, et nommèrent une commission chargée de négocier entre l’hôtel de ville et la préfecture. Ces délégués ne représentaient que l’élément révolutionnaire des bataillons et l’hôtel de ville plongeait de plus en plus dans la peur.

Une guerre à coups de proclamations s’engagea entre