Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/253

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La délégation commit une autre faute. Aux termes de la convention militaire, l’armée allemande devait évacuer les forts de l’est de Paris après le versement par l’Etat de 500 millions. Il importait à la Commune de savoir si ce versement était fait, auquel cas Paris était complètement cerné par Versailles. Le délégué eut le tort — autorisé, il est vrai, par la Commune — d’écrire au général Fabrice commandant les forces allemandes, lequel s’empressa de communiquer la lettre à Jules Favre qui la lut à l’Assemblée versaillaise avec les commentaires voulus. La délégation se leurrait de l’idée que la Commune pourrait payer ces 500 millions et deviendrait ainsi maîtresse des forts de l’est. L’Allemand riait de cette prétention de remplacer l’État et ne ménageait pas ses bons offices à Versailles. Les fédérés ayant réarmé le fort de Vincennes serré de près par les Prussiens, l’Allemand demanda à la Commune le désarmement immédiat. La délégation fut blessée de n’avoir pas reçu la demande ; il y eut un incident pénible et le parlementaire allemand put visiter le fort. Rossel s’en plaignit dans la séance du 5 Mai. Ces pourparlers, ces mouvements inutiles permirent aux calomniateurs de dire que la Commune négociait avec l’étranger.

Contre l’astucieuse habileté de M. Thiers, cette délégation ainsi conduite ne pouvait guère peser. Quand, le 15 mai, elle appela la province aux armes et lui offrit pour délibérer le Palais du Luxembourg, la province était depuis longtemps bouclée. Elle montra, il est vrai, beaucoup de zèle à protéger les nationaux étrangers et envoya à la Monnaie l’argenterie du ministère, « que ces messieurs s’approprièrent » ne manqua pas de dire Jules Favre, le travail utile se réduisit à fort peu.

Voici les délégations vitales. Puisque la Commune est devenue, par la force des choses, le champion révolutionnaire, puisqu’elle s’arroge les droits nationaux, qu’elle proclame les droits du siècle, et, si elle meurt, laisse un drapeau sur sa tombe. Il lui suffit de formuler avec clarté des revendications accumulées depuis l’arrêt de la Révolution française.

Le délégué à la Justice n’avait qu’à résumer les réformes réclamées depuis longtemps par tous les démo-