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APPENDICE

sidents de cour d’assises se font faute de passer au crible les antécédents des accusés. Le motif de cette réticence extraordinaire est qu’il ne fallait pas jeter un blâme sur l’armée et sur les conseils de guerre qui avaient fusillé ou condamné des pétroleuses peut-être pour ces mêmes maisons incendiées par Prieur de la Comble.

Voici encore une pièce édifiante et officielle :

« Aujourd’hui, vingt-neuf novembre 1871, devant nous, Evariste Port, juge d’instruction de l’arrondissement de la Roche-sur-Yon, en vertu de la commission rogatoire de l’un de MM. les juges d’instruction au Tribunal de la Seine, etc., etc., assisté de Reygondeau, notre greffier.

« Est comparu le témoin Hertz (Emile), âgé de trente-sept ans, commandant du génie de la circonscription de la Roche-sur-Yon, qui dépose :

« Le jeudi 25 mai, dans le courant de l’après-midi, étant occupé à arrêter les effets de l’incendie allumé au palais de justice et à la préfecture de police, à Paris, je fus abordé par un monsieur dont j’ignore le nom[1] ; il était de taille au-dessous de la moyenne, brun de visage, avec une légère barbe noire ; il était accompagné d’un jeune homme qui semblait moins âgé que lui : il se disait commis au greffe du tribunal correctionnel de Paris : il m’invita à venir reconnaître avec lui l’état des lieux au foyer de ce greffe, qu’il disait renfermer des valeurs considérables. Il était armé de plusieurs clés et sa connaissance des lieux et des employés présents au palais ne mettaient pas en doute chez moi la sincérité de sa compétence.

« Il me conduisit sans hésiter au dernier étage du bâtiment du tribunal correctionnel, fermant au sud de la cour de la Sainte-Chapelle. Ce bâtiment était préservé pour la partie ouest seulement, attenant je crois à la préfecture de police qui était ruinée de fond en comble.

« Là, il me fit voir un coffre-fort forcé, me disant que l’argent monnayé avait été soustrait ; un grand nombre de bijoux, les uns répandus en désordre, les autres rangés sur des étagères, enfin plusieurs liasses de valeurs publiques et de bank-notes[2].

« Ces objets furent réunis rapidement, les valeurs ser-

  1. T… évidemment, gardien du greffe pour Versailles.
  2. Par ordre de Ferré l’argent monnayé avait été enlevé et il servit aux besoins de la lutte ; mais tous les bijoux, pierres précieuses, valeurs et billets de banque étaient restés.